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Opération Jubilée: 75 ans après, le raid de Dieppe revisité

Le 19 août 1942, 6.000 hommes débarquent sur les plages de Dieppe, en France. Pour célébrer le 75ème anniversaire de ce raid méconnu de la Seconde Guerre mondiale, le Musée de l’Armée lui consacre une exposition commémorative

Temps de lecture: 5 min

Le 18 août 1942, les alliés font route vers les côtes normandes. Les anglo-canadiens assurent le leadership de l’opération baptisée « Jubilée ». Au petit jour, un convoi allemand les repère et donne l'alerte. L’effet de surprise est perdu et le raid vire à la tragédie. Les Allemands ouvrent le feu sur les péniches alliées, alors qu’elles sont encore à 10 mètres de la plage, et bombardent les chars d'assaut qui se révèlent incapables de manœuvrer. Les hommes tombent, fauchés par les balles, les éclats d’obus et de mortier. La retraite en désordre laisse plus de 3.000 tués, blessés ou faits prisonniers. De ce cuisant revers, le général Eisenhower dira toutefois : « Sans Dieppe, nous n'aurions pas eu les connaissances utiles au bon déroulement du débarquement de Normandie ». Les leçons apprises deux ans plus tôt fourniront le savoir nécessaire à gagner de la guerre.

Un styliste de mode collectionneur privé

« Il aura fallu plus d’un an pour mener à bien ce projet », nous explique Dominique Henrard, commissaire de l’exposition au Musée de l’Armée (*). « Le travail a été titanesque. Nous avons confronté un maximum les sources pour être au plus près de la réalité historique. Maquettes des plages, photographies des soldats et affiches d’époque, au total 99 pièces et documents uniques issus notamment de collections privées, sont présentés. » Parmi ces collectionneurs, Hervé Fihue et Thierry Mainguet, styliste de formation. « J’habite sur les hauteurs de Dieppe. J’ai grandi avec tout cet univers du raid qui s’offrait à mes yeux. Sous la maison familiale, il y avait un blockhaus dans lequel, enfant, je jouais pendant des heures. De fil en aiguille, j’ai commencé à ramasser des objets sur la plage, à acheter des casques sur les brocantes pour, au final, mettre mon métier au service de ce passé. J’ai aujourd’hui une cinquantaine de mannequins que je customise sur base d’images d’époque, mais en y intégrant ma modernité. Cette démarche transcende le simple déguisement. Chaque visage est peint à la main. Je peux travailler le moindre détail, comme la profondeur d’un œil, pendant 3, voire 4 heures. Tout simplement parce que derrière un personnage, il y a son histoire et ses émotions que je cherche à retranscrire le plus fidèlement possible. »

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L’opération « Jubilée » dessinée

L’exposition aborde également le raid par le dessin, à travers les planches en deux tomes de J.G.Wallace (scénariste) et Stéphan Agosto (illustrateurs). La trame : au Canada naissent deux jeunes gens, l’un à Woodstock, et l’autre à Montréal. Leurs trajectoires sont différentes, mais ils vont se retrouver dans l’armée canadienne en formation pour rejoindre l’Angleterre. L’attente est ponctuée d’entraînement. Lorsque la guerre éclate, Edwin, Jacques et leurs camarades rejoignent leurs unités. Ces hommes à la fleur de l’âge vont alors découvrir les hautes falaises de la côte dieppoise, mais surtout, toute l’horreur d’un bain de sangs mêlés. Dans les airs, 700 appareils allemands et 1200 appareils alliés dont les moteurs s’entendent à plus de 5 km à la ronde. Ce sera la plus grosse bataille aérienne de tous les temps.

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Spooky, un chat à la mer !

Autre vecteur de commémoration : le conte. Inspiré d’un fait réel, le récit de Diane Condon-Boutier, qui s’adresse aux tout jeunes lecteurs, a pour héros, un chat, de son vrai nom « Sooty ». Originaire de Newhaven, il appartenait à des volontaires féminines stationnées dans un bureau situé sur les quais. Le 18 août 1942, le félin s’invite à bord d’un des navires, un Tank Landing Craft (TLC5), qui va participer au raid du lendemain. Mais, le TLC5 sera fortement endommagé par les tirs allemands et les membres d’équipage seront contraints de quitter le navire. Sooty se retrouve également à l’eau, s’accrochant au filet de camouflage posé sur le casque d’un soldat. Les survivants de la barge sont alors récupérés à bord d’un autre navire, en ce compris Sooty qui deviendra la mascotte des survivants du raid. Une demande sera faite pour que ce chat emblématique reçoive la Dickin Medal (Médaille militaire instituée en 1943 et décernée à des animaux pour honorer leurs faits de guerre). Elle sera refusée car Sooty était considérée comme une passagère clandestine. En 1992, une campagne fût relancée pour mettre l’animal à l’honneur, sans plus de succès. Un vétéran, qui était à bord du TLC5, donnera alors sa General Service Medal en mémoire de ce chat resté trop longtemps non décoré.

Transmettre pour maintenir la paix

« Mémoire d’un raid » est la première exposition organisée par le War Heritage Institut (WHI), une toute nouvelle entité dédiée au patrimoine militaire et à la mémoire qui a démarré le 1er mai dernier. Quatre structures, sous tutelle de la Défense, sont reprises en une seule organisation : le Fort de Breendonk, l’Institut des Vétérans, le Musée Royal de l’Armée et le Pôle Histoire de la Défense. « Dans un contexte contemporain où le vivre-ensemble est particulièrement en danger, nous ambitionnons de promouvoir auprès des générations nouvelles des valeurs telles que la paix, la tolérance, la démocratie et les droits de l’homme», nous explique Michel Jaupart, directeur général du WHI. Et cette transmission, pour ne pas ‘oublier’, passe par une valorisation de notre patrimoine militaire, par une intensification du devoir de mémoire et par des outils pédagogiques interactifs porteurs d’une réflexion sur les conflits armés qui ont marqué notre Histoire. »

(*) « Mémoire d’un Raid » - Jusqu’au 31 décembre 2017 - Musée Royal de l’Armée et de l’Histoire Militaire - Plus d’infos sur : www.klm-mra.be - www.museedelarmee.be - Visites guidées sur réservation : 02 737 78 07- Deux parcours : 7/9 ans (ludique) – 10/14 ans (scolaire)

Peacekeeper : des enfants casques bleus d’un jour

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Le 21 juillet, jour de la Fête nationale, l’Institut des Vétérans organise, pour la septième année consécutive, « Peacekeeper », un jeu destiné aux jeunes de 8 à 16 ans pour apprendre, de façon ludique, comment la Défense entraîne ses militaires avant de partir en mission de maintien de paix à l’étranger. Muni d’un ordre de marche, le jeune part en mission. Découvrir un hélicoptère A109, visiter le cockpit d’un F16, utiliser des moyens de détection et de déminage, avancer à l’aveugle guidé par une radio, transporter un blessé à travers un parcours, identifier des blessures, parmi les nombreuses animations de la Défense proposées, il choisit sept missions à accomplir. Le parcours complété, il reçoit le certificat de « vétéran Peacekeeper ».

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