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Bruno Coppens: «Faire l’amour n’est pas une fin en soi»

Entre deux spectacles, émissions de radio et livres, l’humoriste et comédien belge se livre, côté cœur, côté sexe.

Temps de lecture: 6 min

Votre dernier spectacle s’appelle « Lover booké ». Dans votre livre « 106 façons de survivre à ces temps assommants », vous conseillez le don d’orgasme ! Je vous cite « Offrez votre corps à la séance. Livrez-vous physiquement. Multipliez les jaillissements séminaux hors cadre, hors famille, hors couple, orgasmiques. Voilà une bonne façon de se libérer totalement des contraintes sociales et de l’éthique, un voluptueux moyen de foutre en l’air cette vanité de l’homme qui cherche à tout classer, caser, réglementer. » Lors de la journée de l’orgasme du 21 décembre dernier, vous avez loué les bienfaits physiques du sexe lors de votre chronique du Café serré diffusé sur la RTBF. Le sexe est-il important pour vous ?

« Faire l’amour n’est pas une fin en soi mais une étape naturelle intense qui s’inscrit dans une rencontre amoureuse : on commence par se tenir la main, puis par s’embrasser pour passer naturellement au sexe. Le sexe fait partie de la vie et j’aime l’intimité et la sérénité des corps qu’il offre. Vous êtes bien à côté de l’autre et le silence qui peut alors s’installer n’est pas un poids mais un moment de partage riche de tout ce que vous avez vécu. »

Vous pouvez concevoir le sexe sans amour ?

« Non, sexe et amour forment un tout. Mais je parlerais non pas d’amour mais d’émotion, de désir. Personnellement, je ne peux pas coucher avec une femme et lui dire ensuite au revoir. Je suis très romantique. J’aime ressentir l’attente, l’éveil des sentiments et la montée du désir. J’apprécie la progression de la séduction quand on avance vers l’autre, puis se met en retrait pour laisser l’autre libre de venir à vous. La liberté de l’autre est essentielle. Il peut ainsi se passer des jours, des semaines avant que je ne me retrouve dans le lit de la femme que je désire. »

Adolescent, vous étiez un séducteur ?

« J’étais très timide et pas sûr de mon physique. J’étais le dernier d’une famille de 8 enfants avec des frères très sportifs. Moi je ne faisais aucun sport et je n’étais pas à l’aise dans mon corps. Je lisais tout le temps ; la lecture était ma came. À l’internat où mes parents m’avaient placé, j’écrivais des poésies et des lettres de 20 pages à la fille dont j’étais amoureux et elle me répondait par des missives aussi longues. Mais je me souviens qu’elle m’a offert un terrible moment de honte. Quand nous nous sommes retrouvés à un stage de formation pour devenir animateur du mouvement de jeunesse « Patro », elle est venue à notre rendez-vous avec une amie ! Elle m’avait écrit de longues lettres d’amour mais ne voulait pas commencer quoi que ce soit avec moi. Pour compenser, elle m’offrait son amie. J’ai vécu cela très mal. »

Quand avez-vous surmonté votre timidité ?

« À l’université, j’ai senti que les filles posaient un autre regard sur moi. Mes copains m’avaient d’ailleurs donné le surnom d’« oiseau sur la branche » car je volais d’une fille à l’autre et je parlais avec toutes les filles lors des soirées d’étudiants. »

Monter sur les planches ne vous a-t-il pas aidé ?

« La scène m’a donné confiance et m’a aidé à m’accepter tel que j’étais. Mais vous savez, quand je joue sur scène, il se passe quelque chose de très fort entre le public et moi. Quelque chose de sexuel, d’érotique qui m’offre un plaisir intense. Une sensation me parcourt alors le corps. Quand je rentre chez moi, j’ai une énergie folle – je chante d’ailleurs à tue-tête pendant le trajet qui me ramène chez moi, je suis un véritable panneau photovoltaïque – c’est très jouissif ! »

Comment expliquez-vous cela ? Les regards braqués sur vous sont excitants ?

« Je carbure à l’humain ! Faire rire a un grand pouvoir de séduction et quand je fais rire une salle aussi grande que celle de l’Aula Magna à Louvain-la-Neuve, cela me procure une sensation érotique étrange et forte. »

Qu’est-ce qui vous touche chez une femme ?

« C’est d’abord le non verbal, une silhouette, une attitude, une pose qui me donne envie de découvrir une femme. J’aime une allure ronde et fragile plutôt que nerveuse et agitée. La fragilité me touche particulièrement. »

Pourtant la femme que vous aimez depuis près de dix ans ne semble guère fragile ; elle qui court le monde et même des zones de guerre pour faire des reportages.

« La fragilité que je vois dans le regard de Françoise, c’est sa liberté, son indépendance, sa capacité à tout quitter en un quart d’heure. Elle est avec moi mais n’est jamais installée. Elle est toujours prête à partir à l’autre bout du monde pour un reportage. Nous avons tous les deux la même énergie. »

À 57 ans, comment gérez-vous l’évolution des corps et de la libido ?

« Françoise et moi ne vivons pas à 100 % ensemble. Nous n’avons pas de routine mais choisissons des moments à deux pour les vivre intensément. Nous avons une préférence pour les instants et les endroits en décalage complet avec les horaires et lieux traditionnels : les après-midi, une maison isolée sur la côte. Faire l’amour quand tout le monde travaille est très jouissif. Nous prenons le temps, sacralisons ces moments pour mieux les protéger. Nous nous laissons aller à la lumière. »

Amour rime – t-il pour vous avec fidélité ?

« La fidélité est une notion qui change avec le temps. J’ai vécu celle du pater familias qui construisait une famille pour me séparer après 15 années de vie commune. J’ai alors papillonné pendant 7-8 ans jusqu’à ce que je rencontre Françoise à 48 ans. Et nous profitons ensemble du meilleur de la vie. La fidélité dans notre relation est naturelle. Ni elle ni moi ne nous rendons compte des regards portés sur nos personnes. »

Vous n’êtes pas d’un tempérament jaloux ?

« Je ne suis pas jaloux : quand j’aime, j’ai une totale confiance en l’autre. »

Vous qui êtes un expert des mots, que vous inspire l’expression « faire l’amour » ?

« Elle n’est pas très belle. Par contre le mot « jouir » est superbe. On y entend « jouer » et « ouïr ». Il résonne des cris d’amour et des jeux des corps. On joue quand on fait l’amour, on est le jouet de l’autre qui est notre jouet. On donne du plaisir et on en reçoit. On est sujet et objet. C’est… »

Bruno Coppens est tous les mercredis soirs à 20h à l’Apollo Théâtre (Paris) avec son spectacle « Loverbooké ». Fin janvier ainsi qu’en février et mars il repart en tournée en Belgique (Ath, Fleurus, Arlon) avec « La vie est un dessin animé ». www.brunocoppens.com

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