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Guillaume Apollinaire, le poète éclairé

Le 26 août 1880 naît à Rome un petit garçon, de père inconnu et de mère souhaitant le rester...

Temps de lecture: 4 min

Quelques semaines plus tard, la pondeuse, de petite noblesse polonaise, se ravise et lui prête son nom : Kostrowitzky. Le poupon ne déchaîne donc pas les passions, mais patience, à son prénom il accrochera une étoile et deviendra Guillaume Apollinaire pour le plus grand rayonnement des constellations. Après tout, n’est-il pas né dans la Ville éternelle et Apollon n’est-il pas le dieu des poètes ?

Rapidement, sa mère lui offre un petit frère, d’un autre père tout aussi discret. Avec sa cuisse légère de demi-mondaine, la dame mise beaucoup sur ses charmes. Elle trimballe ses enfants à Monaco, Nice… partout pourvu qu’il y ait un casino pour exercer ses talents. Malgré cette mère peu conventionnelle, Guillaume fait des études classiques dans un collège catholique.

En 1899, les aventures maternelles les précipitent à Paris. Guillaume a 20 ans et travaille dans une banque pour remplir sa gamelle. Cet être gourmand et charmant s’attire rapidement les faveurs de cette ville qui semble conçue pour les esprits créateurs de son espèce. Guillaume est d’une érudition folle et éclectique, il dévore les livres, la bonne chère, et les femmes n’échappent pas non plus aux appétences de cet homme curieux et généreux. Il caracole de jupon en jupon sans jamais être fripon ; amoureux dans l’âme, il désolidarise rarement le cœur de ses ardeurs.

Des rencontres décisives

Tous les sens en alerte, Guillaume se fraye donc un chemin vers son art et son renom. Sa force, c’est sa plume et très vite il fait ses premières rencontres décisives comme Picasso et Max Jacob. Ils sont jeunes et veulent refaire le monde. Seule la mort séparera ce trio génial.

À partir de 1905, Guillaume s’adonne à la critique d’art. Le regard qu’il pose sur les créations de son époque est résolument neuf, plein d’élan, avant-gardiste. Il défendra les fauves et les cubistes, alors que beaucoup leur jettent des cailloux. Lui les installe dans une légitimité artistique. Il est familier de Montmartre et du « Bateau-Lavoir », cette bâtisse déconfite qui abrite les faiseurs de ce siècle, poètes et peintres, unis dans un même élan, une même émulation.

En 1907, il rencontre Marie Laurencin qu’il glisse dans sa vie. Toujours, il célébrera avec verve l’immense talent de cette peintre qu’il aimera avec autant de ferveur.

Dès 1910, il vit de ses écrits. Sous sa plume disparate, tout se tente, de l’essai pornographique aux poèmes les plus romantiques en passant par des chroniques artistiques. Il commence à avoir du succès. Mais soudain en août 1911, coup de tonnerre : la Joconde nous perd de vue (à moins que ce ne soit l’inverse), et se volatilise du musée du Louvre. Les soupçons se posent sur l’ancien secrétaire de Guillaume et par ricochet sur lui-même. Arrêté, écroué, Apollinaire redevient l’étranger Kostrowitzky et expérimente la vindicte populaire. Cinq jours plus tard, meurtri, il quitte la prison de la Santé, blanchi mais sali à vie. Dans la foulée, après cinq années de romance tumultueuse, Marie, lassée par un Guillaume volage, se retire de la danse. Apollinaire est dévasté et écrit alors son célèbre « Pont Mirabeau ».

Naturalisé peu avant sa mort

Lorsque la guerre éclate, il s’engage. Entre-temps, il tombe amoureux d’une certaine Louise de Coligny-Châtillon, mais la jeune fille, si elle s’offre à lui, ne sera jamais éprise. Elle inspire pourtant au poète sans illusions les magnifiques « Lettres à Lou ».

En 1916, blessé à la tête par un éclat d’obus, il est trépané et enrubanné. Il pourrait désormais sortir du tableau de l’un de ses amis cubistes, bien que sa tête soit restée ronde. En pleine convalescence parisienne, il trouve encore le moyen de s’émouvoir pour une femme qu’il épouse. Le mariage dure le temps d’un soupir puisque le 9 novembre 1918, il est emporté par la grippe espagnole. Huit jours avant, la France, avec un flair de dernière minute, avait naturalisé cet apatride qui forgea son art et sa gloire en puisant dans les lumières de la cité fantastique : Guillaume Apollinaire,

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