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L’homosexualité est-elle un choix?

L’homosexualité est-elle biologique ou choisie par l’individu ? Les réponses de la psychologue canadienne Louise Cossette qui a dirigé la publication « Cerveau, hormones et sexe ».

Journaliste Temps de lecture: 4 min

L’homosexualité a fait débat il y a quelques semaines en France. Le polémiste Eric Zemmour, connu pour ses positions réactionnaires – on rappelle qu’il vient d’être condamné pour provocation à la haine religieuse – a suscité l’indignation en affirmant que l’homosexualité relevait d’un choix.

Qu’en est-il exactement ? Louise Cossette, professeure au département de psychologie et membre de l’Institut de recherches et d’études féministes de l’UQUAM, l’Université du Québec à Montréal, assume la direction d’une petite publication des plus intéressantes « Cerveau, hormones et sexe. Des différences en question ». Elle répond ici à nos questions.

louise

L’homosexualité est-elle un choix ?

« Les études disponibles ne permettent ni d’affirmer que l’homosexualité est un simple choix, ni qu’elle est déterminée par nos gènes. Il est possible que des facteurs génétiques soient en jeu mais les gènes ne déterminent certainement pas à eux seuls l’orientation sexuelle. Si c’était le cas, il y aurait une parfaite concordance dans l’orientation sexuelle de jumeaux et jumelles homozygotes. Bien que cette concordance soit plus élevée chez les jumelles et jumeaux homozygotes que chez les dizygotes, elle est loin d’être parfaite.

À propos du gène de l’homosexualité qui serait transmis par la mère, les études sont formelles. Il n’y a pas un seul gène de l’homosexualité, probablement plutôt un ensemble de gènes, et ils ne peuvent être uniquement transmis par la mère.

Des études ont aussi tenté d’examiner l’influence d’autres facteurs biologiques sur l’orientation sexuelle comme, par exemple, l’exposition prénatale à des niveaux élevés d’androgènes pour les filles ou à des hormones dites « féminines » pour les garçons, mais rien de très clair ne se dégage de l’ensemble de ces études.

Du côté des facteurs environnementaux (éducation reçue, expériences de vie, etc.), encore une fois, on ne peut clairement identifier de facteurs qui expliqueraient l’orientation sexuelle. Bref, l’origine de l’orientation sexuelle reste inconnue. Il est possible qu’il y ait une foule de facteurs biologiques et environnementaux qui interviennent et ces facteurs peuvent même varier d’une personne à l’autre.

Les études récentes nous ont, par contre, appris autre chose. On croyait qu’une fois établie, l’orientation sexuelle était stable chez les individus et on se rend compte qu’elle est plus fluide, changeante que ce que l’on croyait. Elle peut se modifier au cours de la vie. Il y a aussi les cas de plus en plus nombreux et documentés d’individus qui sont bisexuels, c’est-à-dire que leurs partenaires sexuels peuvent être tantôt des femmes, tantôt des hommes.

En somme, l’orientation sexuelle semble infiniment plus complexe que ce que l’on a longtemps cru.

Comme vous pouvez le voir, je ne vous donne pas ici mon opinion mais bien ce que nous montre une énorme quantité d’études sérieuses. »

Vous ne craignez pas que votre doute aussi essentiel soit-il ne soit récupéré par des partis traditionnels et réactionnaires pour condamner les homosexuels et les remettre dans le « droit chemin » ?

« De quel doute s’agit-il ? Le seul véritable doute actuellement est d’ordre scientifique. Les études scientifiques réalisées au cours des dernières décennies ne nous permettent pas d’expliquer clairement l’origine de l’orientation sexuelle. »

La sexo-analyse, une approche très psy de la sexologie, met en avant des liens particuliers avec la mère pour expliquer l’homosexualité. Qu’en pensez-vous ?

« Il y a beaucoup d’opinions, parfois assez divergentes, sur le rôle de ce que vous appelez ces « éléments psychologiques » ou expériences de vie. Ces opinions sont parfois fondées sur quelques cas mais ce qui peut être vrai ou sembler vrai pour une personne ne l’est pas forcément pour une autre. »

Dans votre ouvrage, « Cerveau Hormones et sexe », l’homosexualité ne fait qu’un chapitre, vous abordez les différences psychologiques entre les deux sexes. Quel est le but de cet ouvrage ? Une exaspération par rapport aux propos qui sont généralement tenus sur le sujet ?

« Nous avons tenté dans cet ouvrage de dénoncer tout un ensemble de préjugés, de stéréotypes souvent millénaires justement parce qu’ils ont des répercussions très négatives sur les individus et la société. Les études scientifiques réalisées au cours des dernières décennies montrent vraiment à quel point il faut revoir nos conceptions traditionnelles de l’orientation sexuelle et des différences psychologiques entre les sexes. Il y a un écart considérable entre ce que l’on diffuse généralement dans les grands médias et ce que nous apprennent ces études qui sont très peu connues dans le grand public. »

cerveau
Cerveau Hormones et sexe est paru aux éditions du remue-ménage, 112p., 11 euros

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