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Sexualité: quel est votre désir?

Une étude belge interroge les femmes sur leur sexualité et les conceptions qu’elles ont des comportements sexuels des hommes et des femmes.

Temps de lecture: 4 min

Le désir… Le désir sexuel est cette force de vie qui nous fait exister, chavirer, trembler, avancer, bouger, vibrer, pleurer, jouir de l’autre, pour l’autre, avec l’autre… Il manifeste une vitalité cherchant à exulter.

Mais souvent avec le temps, celui-ci s’affaiblit au sein des couples. Pour de multiples raisons, l’envie de relations sexuelles perd de la force chez les hommes comme les femmes mais davantage chez ces dernières. La perte de désir sexuel des femmes est un problème fréquent. Maintes études – il y en a plus d’1 millier – le confirment et évaluent que le « DSH », le « Désir sexuel hypoactif » comme les sexologues le nomment, touche entre 30 et 50 % des femmes. Ce n’est pas pour rien que les labos du monde entier s’acharnent à trouver « le » médicament ou le spray, gel vaginal, patch, pilule à même d’aider les femmes à retrouver le désir.

La faiblesse – ou la force – de ce désir est liée à mille facteurs, aussi bien physiologiques que personnels, éducationnels, relationnels, culturels et sociétaux. Ces derniers facteurs sont peu étudiés en sexologie. Dans « Le désir sexuel des femmes, du DSM à la nouvelle médecine sexuelle », Marilène Vuille, spécialiste suisse des études de genre, parle même d’un « aveuglement de la sexologie aux rapports sociaux de sexe », invitant les spécialistes à réfléchir à « l’exercice de la sexualité en situation de domination sociale et sur la place occupée par le désir selon que les individus (les hommes comme les femmes) sont dominés, dominants ou égaux dans la relation sexuelle. »

Des facteurs sociaux trop peu étudiés

Et ces « rapports sociaux de sexe », pour reprendre la formule de Marilène Vuille, héritent du passé. Pendant des millénaires, la société patriarcale a offert la sexualité aux hommes et le relationnel aux femmes. Elle a appris à ces dernières à contrôler leurs désirs, à ne pas être trop libres au risque de pâtir d’une mauvaise réputation. Depuis des temps immémoriaux, il a été dit et répété aux jeunes filles que leur sexualité est plus émotionnelle et relationnelle, qu’elles ne peuvent dissocier sexe et sentiments au contraire des garçons qui auraient une sexualité plus forte et plus physiologique. Même la révolution sexuelle n’a guère changé les codes qui voit les jeunes adolescent.e.s toujours soumis.es aux stéréotypes sexuels de genre. « Le pouvoir du patriarcat est encore fort, que les hommes et les femmes sont soumis à des normes sexuelles différentes, que les hommes ont plus de liberté sexuelle et que la sexualité des femmes subit encore des pressions normatives et sexistes. » écrit Eva Illouz dans « La Fin de l’amour » (éd. du Seuil).

De nombreuses études montrent que ces conditionnements sexuels de genre existent toujours et impactent les comportements des hommes et des femmes et même des adolescent.e.s. Une des dernières en date « Measuring gender norms about relationships in early adolescence : Results from the global early adolescent study » publiée en 2019 et menée dans 14 pays – dont la Belgique – auprès de centaines de jeunes âgés de 10 à 14 ans confirment que les pré-ados estiment, quelles que soient leurs cultures, que les garçons ont une sexualité « naturelle » et que ce sont eux, qui décident des jeux amoureux et prennent l’initiative. Les filles elles, n’ont pas ce pouvoir ; elles doivent même éviter les contacts avec les garçons car ils sont risqués. Ce sont elles aussi qui doivent assumer la responsabilité des conséquences des rapports sexuels. Ce qui a fait dire aux auteurs de l’étude : « Les scripts sexués concernant les relations amoureuses ont créé des hiérarchies de pouvoir entre garçons et filles ». Celles-ci sont vues comme vulnérables face à un désir masculin, puissant, naturel et inévitable et elles doivent contrôler les relations sexuelles. Mais elles apprennent ainsi la passivité sexuelle, qui est à l’opposé de l »’agentivité sexuelle », notion qui nous vient du monde anglo-saxon et de plus en plus utilisée dans les études de genre. Cette notion signifie que l’on est acteur de sa sexualité : on prend sa sexualité et ses désirs en charge.

Dans quelle mesure ces conceptions stéréotypées des sexualités masculine et féminine influencent-elles également le désir des femmes qui sont en couple ? Dans quelle mesure fragilisent-elles leur envie d’avoir une relation sexuelle avec leur partenaire ?

C’est ce que deux sexologues belges ambitionnent d’étudier. Joëlle Smets, sexologue clinicienne et collaboratrice scientifique de l’ULB et Marie Géonet, docteure en psychologie, sexologue et chargée de cours à l’UCL entreprennent une étude quantitative qui interroge les femmes (min 18 ans) engagées dans une relation amoureuse (au minimum 6 mois) d’une part sur leur sexualité et leur désir sexuel et d’autre part sur les conceptions qu’elles ont des sexualités et comportements sexuels des hommes et des femmes.

L’étude, mise en ligne ce mois de mars, est accessible :

https ://webapps.ulb.ac.be/facpsystudents/index.php/429497?lang=fr…

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