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L’affaire Dupont de Ligonnès: en 10 ans, l’intérêt médiatique n’est jamais retombé

Dix ans après, l’affaire de la « tuerie de Nantes » a inspiré un nombre vertigineux d’enquêtes, romans, émissions, documentaires ou téléfilms, d’auteurs fascinés par le personnage de Xavier Dupont de Ligonnès et sa fuite.

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« Sans pitié pour les siens », « Le Disparu », « la maison de l’horreur », « Un homme ordinaire », « chaux vive »… La liste des œuvres sur le quintuple assassinat et la disparition du suspect Numéro 1 ne tarit pas.

«  L’affaire Ligonnès est saisissante par le côté mystère. Chacun veut un peu faire sa propre enquête, avoir sa propre opinion. On devient tous un peu journaliste ou flic en s’y penchant », explique Fabrice Drouelle, qui présente l’émission culte sur France Inter « Affaires sensibles ».

«  Autant l’affaire Grégory a été le plus grand fait divers du XXe siècle et de l’après-guerre, autant cette affaire est le plus grand fait divers de ce début de siècle », reconnaît le journaliste, qui a présenté plus de 120 faits divers.

L’écrivain Samuel Doux, qui se glisse dans la peau de « XDDL » dans le roman « L’éternité de Xavier Dupont de Ligonnès » (Julliard, 2020), explique l’intérêt suscité par cette affaire par le «  fantasme de la disparition ».

«  On est pris dans nos vies quotidiennes, par les injonctions de la société : il y a une fascination à pouvoir se libérer totalement des liens qui nous unissent à la famille, à la société et de disparaître complètement », explique Samuel Doux. Lui-même se dit touché «  par une forme d’obsession pour cette affaire, qui obsède un peu tous les Français, tant elle est incroyable ».

Une affaire qui a également intrigué hors de l’Hexagone depuis la diffusion d’un documentaire à l’été 2020 (Les enquêtes extraordinaires) sur Netflix, qui compte 204 millions d’utilisateurs dans plus de 190 pays, selon les chiffres communiqués par le service de presse de la plateforme.

La maison de la famille des Dupont de Ligonnes, située Boulevard Schuman à Nantes.
La maison de la famille des Dupont de Ligonnes, située Boulevard Schuman à Nantes. - MAXPPP

« 30 ans de vie française »

Toujours à l’été, le magazine Society a vu ses ventes s’envoler – plus de 400.000 – pour une longue enquête parue sur l’affaire, aussi disponible en livre (Marabout/So Press). «  On savait que ça marcherait, mais on ne pensait pas que ça marcherait aussi bien ! On parle d’un sujet que tout le monde connaît et tout le monde a l’impression d’avoir tout lu, en apportant beaucoup d’éléments nouveaux », analyse Franck Annese, directeur de la publication.

Pour expliquer le retentissement de cette affaire, outre son halo de mystère, Franck Annese estime qu’elle «  raconte 30 ans de vie française : les relations intimes et amicales, les relations de couple, aussi altérées avec une maltraitance psychologique de Ligonnès envers sa femme. C’est aussi le fantasme de l’argent facile avec internet, avec lui qui croit pouvoir monter des sites et faire fortune, le patriarcat de l’époque, la noblesse désargentée qui vit au-dessus de ses moyens avec des mœurs parfois étranges, sans oublier le fantasme des États-Unis », égrène-t-il.

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Pour la journaliste Anne-Sophie Martin, qui a publié en 2016 une enquête fouillée (« Le Disparu », Ring), cet intérêt pour le quintuple assassinat s’explique aussi par le nombre d’écrits laissés par le suspect, ce qui permet aux écrivains et journalistes d’avoir une foule de matière à explorer et de tenter de cerner la personnalité du fugitif.

«  On dirait un scribe ! On a l’impression qu’il écrit tout le temps : ses problèmes conjugaux, sur les questions de religion, la vie de la famille ou l’éducation des enfants », remarque-t-elle. Autre explication à cette présence en librairie et sur les ondes : «  L es histoires de famille créent une émotion assez forte dans l’opinion. On a quand même une famille rayée de la carte ».

Le psychiatre Michel Lejoyeux a un regard plus critique sur ce déchaînement médiatique. «  Quand on parle beaucoup d’un phénomène, on finit par le créer et de susciter de l’intérêt. Un Roland Barthes aurait été intéressé par le sujet, comme une mythologie qui se crée », relève-t-il.

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