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Les hauts de Hurlevent (1847) d’Emily Brontë

La petite histoire des grands livres

Temps de lecture: 3 min

Souvent cité comme l’un des dix plus grands romans de l’histoire de la littérature, il n’est pas aisé d’apprivoiser le roman d’Emily Brontë. Quand vous saurez qu’il a été librement inspiré par la famille de son auteure, une jeune femme, vous ne verrez plus votre adolescente avec les mêmes yeux!

Le pasteur Brontë, veuf, rapporte un jour à ses quatre enfants un jeu des plus banals: une boîte contenant douze petits soldats de bois. Ce fut pour sa progéniture un déclic qui enclencha une créativité sans fin. Ensemble, ils inventent sans cesse des mondes imaginaires savamment élaborés, doués de systèmes politiques, de contrées fantastiques nourris par leurs illustrations, récits, poèmes… Quatre artistes sont nés et parmi eux, la petite Emily. Dès l’âge de neuf ans, elle collectionne articles de journaux d’actualité, chroniques villageoises, cartes du monde; ils sont ses seules portes sur le monde extérieur. Poétesse qui s’ignore, Emily écrit chaque jour, des années durant, observe méticuleusement son petit entourage et tisse ainsi la trame de sa future œuvre.

Solitaire, prétentieuse, farouche – voire sauvage! – la jeune fille reste cloîtrée au presbytère ou parcourt les landes du Yorkshire, paysage de son roman. Emily ne connaît rien des transports de l’amour, ne se mariera même jamais, ne voyage pas si ce n’est pour un court passage à… Bruxelles et, finalement, n’a que peu d’expérience de la vie. Ennuyeux, pensez-vous? Pourtant, il semble que l’oisiveté soit mère de tous les talents! Son frère adoré, Branwell, peintre soumis à des accès de rage, est torturé par son amour rejeté pour une femme mariée qui s’est moquée de lui. Il accroît son alcoolisme et, sous l’influence permanente d’opium, sombre dans les affres de la passion. Ainsi est né Heathcliff, le terrifiant héros du roman d’Emily – diaboliquement amoureux, immoral et macabre, à l’image du livre tout entier.

Catherine, son héroïne ambivalente, est égoïste et généreuse à la fois, impétueuse et féministe avant l’heure, à l’image de Charlotte Brontë, sœur aînée d’Emily. Parallèlement à l’influence presque magnétique de Catherine dans l’intrigue, Charlotte fut celle qui poussa Emily à publier ses écrits sous un pseudonyme masculin, celle qui tenait tête à Branwell lors de ses crises infernales, obsédée par l’ambition de devenir quelqu’un tout comme son alter ego dans Les Hauts de Hurlevent. Anne Brontë, la cadette, était plus fragile mais tout aussi sensible et douée que le reste de sa fratrie. Ayant souvent souffert de l’autorité de son frère et du charisme de ses sœurs, elle semble avoir prêté de nombreux traits de caractère à Cathy, la fille de Catherine et prisonnière de Heathcliff dans le livre. D’ailleurs, Anne fut gouvernante pendant des années, un écho troublant à la condition de servante de Cathy au sein de la propriété de Hurlevent! De poèmes en récits, Emily publia son chef-d’œuvre un an seulement avant de mourir à l’aube de ses 30 ans, au chevet de son frère atteint par la tuberculose. Contaminée, elle refusa de se soigner, comme entraînée une dernière fois entraînée par l’appel de mort de Heathcliff-Branwell.

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