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Quand les Japonais font l’amour avec des coussins

Au Japon, matelas, édredons et oreillers peuvent devenir des sex-toys ! L’anthropologue Agnès Girard nous explique cette pratique dans « Étreindre les êtres du rêve » publié dans le numéro spécial « Jouir » de la revue d’anthropologie Terrain.

Temps de lecture: 4 min

On connaissait les poupées gonflables, sex-toys grandeur nature aux allures de femmes offertes. Parfois même ces ersatz d’humains se réduisaient à des simples masses de fesses à posséder. Mais voilà qu’Agnès Giard nous révèle l’attachement des Japonais à des sex-toys toys aux allures d’articles de literie. Dans un article des plus intéressants publié dans le numéro 67 de la revue d’anthropologie Terrain consacré à la jouissance, la docteur en anthropologie de l’Université Paris Nanterre évoque les coussins à étreindre qui sont au Japon de superbes sex-toys car « n’ayant pas de forme définitive, ils peuvent épouser les contours de tous les fantasmes. »

Dali Makura
Dali Makura

Kû pillows, Kû dolls, Daki-makura et Cotton wife

Ces jouets sexuels sont multiples, se différenciant dans les matériaux comme dans les formats, ornements et évocations érotiques. Il y a ainsi les Kû pillows, de simples matelas de plastique. Ils ont une taille humaine et sont ornés de dessins de beaux jeunes gens et de séduisantes jeunes filles habillés sur le côté face du matelas et déshabillés sur le côté pile. Il y a les Kû pillows en version plus hot, les Kû dolls, des poupées gonflables transparentes. Il y a encore les Daki-makura, de longs traversins ornés de filles ou de garçons. Appelés coussins à étreindre, ils se coincent entre les bras et les jambes et sont de véritables objets masturbatoires. Des marques proposent même aux amateurs de Daki-makura des Drama CD qui sont des bandes-son avec râles et bruits suggestifs qui se déroulent en trois temps, précise Agnès Girard : rencontre, séduction et passage à l’acte. Des moments de silence sont prévus pour que chacun puisse imaginer ses propres rapports et dialogues avec son Daki-makura. Et puis il y a encore les poupées traversin à taille humaine en version homme et femme. Imaginés par la marque Bibi Lab, ils sont baptisés Cotton Wife et Husband Hug Pillows, épouse et époux de coton, peuvent être habillés, couchés dans un lit, assis sur une chaise…

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Des sex-toys héritiers de l’histoire et de la culture du Japon

L’apparition de tels jouets, nous fait comprendre l’anthropologue française, s’inscrit dans l’histoire du pays du Soleil levant car des gravures du XVIII e siècle appelées « images d’oreiller » montrent des hommes et des femmes qui font l’amour avec leur literie, après avoir attaché un godemiché ou une gaine vaginale à un édredon ou un matelas. De plus ces oreillers, coussins et édredons sexuels appartiennent totalement à la culture nippone. L’oreiller est en effet un objet quotidien d’importance au Japon car il est associé à la tête de la personne, à ses rêves et à son âme au point d’être considéré comme le double subtil de la personne ! L’oreiller a même son temple et sa fête et peut être confié au Hine Jinja qui va prier pour que l’oreiller veille sur l’âme de la personne posant sa tête dessus. Par ailleurs le Japon considère que les objets qui entrent en contact avec le corps humain, surtout si ces contacts sont fréquents et prolongés, peuvent être contaminés par les désirs de leurs propriétaires. Ils sont, comme l’écrit Agnès Girard, les éponges psychiques de la personne ! Quoi de plus logique dès lors que le gardien spirituel de l’âme du dormeur, que l’objet qui accueille les désirs des dormeurs devienne son partenaire érotique.

« Étreindre les êtres du rêve » est un des articles scientifiques de la revue 67 de Terrain. Le numéro intitulé « Jouir » enquête en effet sur le plaisir en observant les manières différentes d’hier et d’aujourd’hui de le penser, le simuler, le susciter ou s’en détourner. « Jouir » parle encore du plaisir à Dakar, des jouissances virtuelles, de la science orgasmique de Wilhelm Reich, du sado masochisme, de l’art de la flagellation, des amours entre cousins en Amazonie indigène, des animaux intégrés dans les productions pornographiques… Les articles sont aussi documentés qu’illustrés de façon abondante et artistique.

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Terrain.revues.org

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