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Tokyo, 6 septembre 2006: Hisahito, le bébé miracle!

Sans ce petit enfant providentiel, le Japon ferait face à une grave crise de règne. Ouf, l’Empire respire !

Temps de lecture: 3 min

Une effervescence inhabituelle anime l’austère parking de l’hôpital Aiiku de Tokyo. Depuis quelques heures, en ce 6 septembre 2006, des dizaines de Japonais se rassemblent, une fleur ou un poème à la main, devant l’entrée principale gardée par des hommes en noir. Ce qui vient de se produire derrière les murs de l’établissement n’est ni plus ni moins qu’un événement « historique ». La princesse Kiko, épouse du fils cadet de l’Empereur, vient de mettre au monde un garçon ! La grossesse fut difficile, et l’accouchement eut lieu par césarienne. Mais qu’importe : le bébé est providentiel. Du haut de ses 48,8 cm pour 2,558 kilos, il incarne l’avenir d’un Trône autrement voué à l’extinction. La tradition du Chrysanthème est respectée : le prénom a été choisi par son père : Hisahito, qui signifie « vertueux et voué à l’éternité », a été écrit sur une épaisse feuille de papier japonais et remis à un haut fonctionnaire impérial, qui a rangé le parchemin dans une boîte taillée dans le paulownia, arbre sacré du Japon, placée ensuite dans le berceau de l’enfant. À ses côtés, une épée offerte par l’Empereur en signe de protection. Quant à l’emblème du mini-prince, il est choisi par sa mère : un pin parasol, arbuste « dont la croissance est saine et rapide ». On l’aura compris : la dynastie met tous ses espoirs en ce bébé miracle qui a mis sous cloche, provisoirement, un long et houleux débat politique autour de la succession par les hommes de ce trône dont la légende fait remonter l’origine à… 2.600 ans !

Égalité des sexes ?

S’il y a une chose que l’on ne peut pas vraiment encore choisir, c’est le sexe de l’enfant. Or, chez les Yamato, on fait des filles ! Sur les 19 personnes que compte la lignée, cinq seulement sont des hommes. La fille de l’Empereur, Sayako, s’est mariée, perdant ainsi tous ses titres. Et chez les deux fils de l’Empereur, il n’y avait eu jusqu’ici que des filles. Elles aussi perdront, un jour, leur titre en épousant un roturier. C’est le cas de la princesse Mako qui a annoncé, en début de mois, ses fiançailles avec Kei, un beau roturier. C’est toute l’injustice de la tradition nipponne puisque les hommes, quelle que soit l’origine de leur épouse, feront d’elles des princesses, voire des impératrices ! Avant le petit Hisahito, conservateurs et progressistes s’étripaient. Les premiers voulaient maintenir la patrilinéarité, quitte à réintégrer dans la lignée des « cousins » éloignés de la famille impériale. Les autres proposaient, simplement, de moderniser la loi en autorisant une succession au premier enfant, quel qu’il soit. Les vieux traditionalistes ont un peu vite oublié qu’avant la loi de succession de 1947, pas moins de huit femmes avaient régné sur l’Empire ! Le prince héritier lui-même s’est à plusieurs reprises prononcé pour un changement des règles pour soulager les consciences, en particulier celle de son épouse. La princesse Masako était tombée en dépression suite aux pressions exercées à l’intérieur même du palais pour qu’elle « produise » un mâle. L’arrivée de son neveu Hisahito, désormais troisième en ligne de succession, fut pour elle un début de résurrection. Âgé aujourd’hui de 11 ans, le petit prince est un bon soldat. Il aime cultiver du riz dans sa petite bassine, dessiner des potagers et choisir les plantes qu’il cultive, et il adore découvrir les particularités des quartiers tokyoïtes ! Son grand-père, l’Empereur, ayant enfin reçu l’autorisation d’abdiquer d’ici un an, le Trône du Chrysanthème respire… jusqu’au prochain blocage. Les Japonais le savent : si Hisahito sera bien leur 128e Empereur, espérons qu’il ait un jour la bonne idée d’avoir un fils, sous peine de rompre la chaîne deux fois millénaire des Yamato !

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