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Secrets pour vivre 100 ans (au moins)

Les centenaires japonais ne sont pas seulement les plus nombreux de la planète, ils sont aussi plus en forme et mieux dans leur tête que leurs homologues occidentaux. Voici pourquoi.

Temps de lecture: 6 min

Le Japon est le pays au monde qui compte le plus grand nombre de centenaires. Et surtout : le plus grand nombre de centenaires en bonne santé pour leur âge, même s’ils paraissent fragiles et menus. Intriguée par ce phénomène, Junko Takahashi, journaliste à Tokyo, a mené une enquête par monts et par vaux pour connaître les raisons de leur longévité. En les questionnant, en observant leur milieu de vie, en traquant leurs habitudes, leur façon de se nourrir, leurs activités et même leur vision de la vie et de la mort, l’auteur de "La méthode japonaise pour vivre 100 ans" a tenté de démasquer "le" secret de leur grande forme. Force lui a été de constater qu’il n’existait aucune "potion magique" commune à tous les centenaires japonais. En revanche, s’ils ont connu des parcours de vie différents et entretenu d’autres coutumes, tous accordent la même importance à l’entretien de leur santé physique et mentale, ainsi qu’à la nécessité de conserver les liens familiaux et d’amitié. Ils restent "ouverts" aux autres et au monde, sont optimistes mais savent aussi se résigner quand le bon sens leur démontre qu’il n’y a pas d’issue. Et l’auteur de constater, à la fin de ses nombreux entretiens avec ces "super seniors" que : « Tous sont polis, respectueux, fiables, attentionnés et déterminés ». Par ailleurs, la vie des hommes centenaires est, observe-t-elle, « réglée comme du papier à musique », tandis que les vieilles Japonaises savourent leur joie d’avoir – enfin – du temps libre…

Tomotaro Aikawa

Une assiette légère, saine et variée

On se doute bien que l’alimentation contribue de façon prépondérante (mais pas unique) au maintien de leur santé. Que mangent-ils ? Le riz, c’est la base. Après, on ajoute une grande variété de légumes, des fruits et quelques mets grillés ou bouillis. Du poisson en grande quantité, des sushis, de la viande de bœuf et du soja. Beaucoup de soja. Que remarquez-vous dans cette liste ? On ne parle pas de desserts, de barres chocolatées, de chips et de limonades, on n’y évoque ni les tagliatelles carbonara, ni les pizzas Hawaï. Oubliés le saucisson, les frites et le cheeseburger à trois étages. Exit même les bonbons qui disent que c’est beau la vie. Parce que les Japonais qui vivent très longtemps mangent peu mais bien. Ils ingurgitent en moyenne 2.719 calories par jour, là où les Français en consomment 3.482 et les Américains 3.639 ! Et, surtout, ils mangent beaucoup plus de glucides (sucres) d’origine végétale et beaucoup moins de lipides (graisses). Le soja sous toutes ses formes (miso, tofu ou nattô) constitue leur source principale de protéines.

Un repas léger est la base d’une bonne santé. Les Japonais ont l’espérance de vie la plus élevée au monde.
Un repas léger est la base d’une bonne santé. Les Japonais ont l’espérance de vie la plus élevée au monde.

Alors qu’à la fin du XIXe siècle, les Japonais vivaient bien moins longtemps que les Occidentaux (en moyenne jusqu’à 44 ans), depuis 1985 leur espérance de vie est désormais la plus élevée au monde. Un phénomène que les scientifiques ont attribué à l’introduction, par les Occidentaux, de la consommation de protéines animales sous forme de viande. Certains médecins ont même fait un rapprochement entre l’augmentation de la consommation de viande (essentiellement le bœuf) et la diminution du nombre d’AVC qui constituaient la première cause de décès depuis 1951. Il y a quand même un point négatif : un habitant sur trois souffre d’hypertension, une maladie dont on attribue la cause au taux élevé de sel qu’ils consomment quotidiennement (11 grammes), alors que l’OMS recommande de ne pas dépasser 5 grammes par jour. Mais ce n’est pas tout : la plupart des centenaires qu’a rencontrés Junko Takahashi ont insisté sur la façon de manger, au moins aussi importante que le contenu de l’assiette. Bien mastiquer (la salive contient une hormone, la parotide, qui ralentit le vieillissement et protège les gencives des bactéries), se nourrir trois fois par jour, prendre conscience de chaque bouchée et ne pas se remplir l’estomac sont des éléments essentiels. Et que boivent ces centenaires ? Du thé vert (riche en vitamine C, minéraux, flavonols et catéchine). Les quelque 6 % d’entre eux qui boivent de l’alcool le font toujours par petites gorgées, optant pour la qualité (alcool sans purines ni sucre). Certains apprécient particulièrement le "shô chû", une eau-de-vie de riz (ou de canne à sucre), riche en une enzyme qui dissout les thrombus et augmente le taux de bon cholestérol. Plusieurs centenaires évoquent l’importance de la frugalité pour allonger la vie et celle de "ne pas attraper froid". Le taux de diabète chez les centenaires est plus bas que celui des septuagénaires !

Mieko Nagaoka, 102 ans, détient 25 records mondiaux et 28 records nationaux de natation dans la catégorie des plus de 100 ans.
Mieko Nagaoka, 102 ans, détient 25 records mondiaux et 28 records nationaux de natation dans la catégorie des plus de 100 ans.

Tout le temps en mouvement

La moitié des Japonais centenaires et quatre femmes sur six s’adonnent à un sport ou font de l’exercice tous les jours. Bon nombre d’entre eux suivent chaque matin, à 6 heures, "Radio Gymnastique" qui échauffe les auditeurs afin de bien commencer la journée. Parmi les centenaires figurent plusieurs athlètes, une arrière-grand-mère qui nage deux fois par semaine, un joueur de golf, des pêcheurs et agriculteurs toujours au travail… À chacun son truc pour se maintenir : les uns font du ménage tous les jours, les autres marchent, dédaignent les ascenseurs, un centenaire fait des exercices oculaires quotidiens (il regarde alternativement de près et de loin), un autre reste toujours debout dans le bus pour exercer son équilibre, une grand-mère chante à pleine voix… Le sang des centenaires actifs contiendrait ainsi davantage d’adiponectine (une hormone qui protège de certaines affections) que les autres. Or, l’adiponectine ne souffre ni l’obésité qui en diminue la quantité, ni le manque de graisse qui accélère le vieillissement : ce sont donc les cellules adipeuses de petite taille qui sont les plus appropriées pour sécréter cette hormone.

Hidekichi Miyazaki, 106 ans, le centenaire le plus rapide au monde.
Hidekichi Miyazaki, 106 ans, le centenaire le plus rapide au monde.

Et la tête dans tout ça ?

La hantise de tous ces centenaires n’est pas de mourir, mais de… "perdre la tête". Aussi la plupart d’entre eux s’entraînent-ils mentalement, l’un en lisant quotidiennement la presse, un autre en conversant avec des personnes plus jeunes, un troisième en s’efforçant, lorsqu’il regarde la télé, de lire complètement les sous-titres avant qu’ils disparaissent de l’écran. Bon nombre de centenaires ont aussi exprimé leur besoin de prendre des notes. Un professeur en médecine spécialisé dans la lutte contre le vieillissement a même élaboré une série de petits ouvrages d’exercices qui stimulent le lobe frontal du cerveau. C’est ainsi que 20 % des centenaires vivent encore très bien chez eux, de façon autonome et dans une condition physique et mentale acceptable. Ce sont les problèmes de vue et d’audition qui les affectent en premier lieu. Enfin, une étude publiée en 2001 a démontré que le taux de mortalité des centenaires diminuait après 105 ans ! Un gérontologue japonais résume la clé de la longévité en trois points : ne pas souffrir de maladies, prévenir sa fragilité et maintenir sa curiosité en éveil. Pour cela, il convient de faire de l’exercice, de bien manger et de toujours conserver de l’intérêt pour quelque chose.

“La méthode japonaise pour vivre 100 ans”, de Junko Takahashi, éd. Albin Michel, 297 p, 17,50 euros.
“La méthode japonaise pour vivre 100 ans”, de Junko Takahashi, éd. Albin Michel, 297 p, 17,50 euros.

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