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Le sucre stimule les cellules cancéreuses

Sucre et cancer ne font pas bon ménage. C’est ce qui ressort d’une étude à laquelle ont participé des chercheurs belges. Le point sur cette découverte et nos conseils pour sortir de l’addiction en douceur.

Temps de lecture: 6 min

Quoi apparemment de plus inoffensif que le sucre, invité permanent de nos tables de fête, qui se décline tout au long de la journée et fait courir les gourmands tout autant que les angoissés en quête de douceur et de réconfort. Hélas ! le sucre n’a pas que des vertus. On le savait déjà mauvais pour les dents, néfaste pour la ligne, cruel pour les diabétiques, mais depuis quelques années, l’intérêt des scientifiques se porte plus que jamais sur son lien avec le cancer. Certes, la suspicion n’est pas neuve : dans les années 1920 déjà, le Dr Otto Heinrich Warburg, physiologiste et biochimiste allemand, Prix Nobel 1931, avait émis l’hypothèse que la transformation du glucose en énergie (quelles que soient les conditions d’oxygénation) par les cellules cancéreuses puisse être la cause de la croissance du cancer. Selon lui, les cellules cancéreuses transforment le glucose en acide lactique (connu pour être un stimulant de la croissance tumorale) plutôt qu’en dioxyde de carbone comme le font les cellules normales. Depuis, la communauté scientifique avait donné son nom à ce phénomène : on parle d’"effet Warburg".

La démonstration belge

En 2008, une équipe composée d’une quinzaine de scientifiques, dont trois chercheurs belges – Johan Thevelein (VIB- KULeuven), Wim Versées (VIB-VUB) et Veerle Janssens (KULeuven) – décida d’étudier de plus près ce fameux "effet Warburg". Après neuf années de recherches, dont les résultats viennent d’être publiés dans la revue scientifique "Nature Communications", ils viennent de démontrer que le sucre pouvait activer la protéine Ras présente dans les tumeurs. Le phénomène serait même un véritable cercle vicieux : plus le cancer est agressif, plus les cellules cancéreuses accélèrent le processus décrit par le Dr Warburg. Et plus elles consomment de sucre, plus le cancer s’aggrave…

Le milieu scientifique avait déjà établi un lien entre les mutations de la protéine Ras et le cancer, plus particulièrement celui du pancréas et du côlon. Cette fois, les chercheurs ont décidé d’étudier la façon dont les cellules de levure – qui contiennent aussi les protéines Ras hyperactives et à croissance rapide – traitaient le sucre. Résultat : l’effet multiplicateur du sucre à l’égard des cellules cancéreuses humaines a été confirmé. À l’issue de cette étude, rien ne permet encore de considérer que le fait de s’abstenir de consommer du sucre empêcherait la survenue d’un cancer. En revanche, dans une interview accordée à "Het Nieuwsblad", Johan Thevelein confirme que « pour un patient atteint d’un cancer, un régime sans sucre ou à faible teneur en sucre n’est pas un luxe inutile : cela peut aider à surmonter le cancer et à rendre la chimiothérapie plus efficace ».

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La chasse est ouverte !

Depuis 2015, l’OMS recommande de ne pas consommer plus de 6 cuillères à café de sucre par jour, soit environ 25 grammes. On y est vite ! Car les sucres cachés foisonnent : il y en a dans les charcuteries, la sauce bolo industrielle, la mayonnaise, les fast-foods, les pizzas, les jus de fruits, la farine blanche raffinée, les biscuits d’apéritif… salés, les frites congelées, les yaourts maigres… en gros dans la majorité des aliments transformés. Dans son ouvrage "Décrochez du sucre" paru en 2014 aux éditions Marabout, le Dr Jacob Teitelbaum, porte-parole de la médecine intégrative aux Etats-Unis, faisait déjà le lien entre sucre et maladies chroniques (syndrome de fatigue chronique, fibromyalgie…). Il explique ainsi que « la transformation des aliments ajoute 63,5 à 68 kg de sucre par an à l’alimentation de chaque personne » et que si le sucre apporte une sensation de bien-être durant quelques heures, il accomplit ensuite des ravages dans l’organisme. Aussi, la première chose que conseille le Dr Teitelbaum est d’éliminer les aliments dans lesquels la quantité de sucre est la moins quantifiable (fast-foods, aliments préparés, sodas et boissons à base de fruits) ainsi que les aliments à base de farine blanche. Au début, vous pourriez éprouver quelque symptôme de manque (irritabilité, mauvaise humeur), surtout si vous tentez d’arrêter la caféine en même temps, mais cet inconfort devrait passer après sept à dix jours.

Pour faciliter ce passage du sucré au non-sucré, optez pour la transition en douceur, en vous accordant une collation de fruits ou deux, trois carrés de chocolat noir de qualité. Choisissez un édulcorant sain et de préférence naturel, comme le stévia ou le sucre-alcool (maltitol, érythritol, inositol), ce dernier possédant des propriétés apaisantes et qui améliorent la densité osseuse. En tout état de cause, si vous ne pouvez pas résister, faites occasionnellement une petite entorse au programme, à raison de deux bouchées. Il paraît que les deux premières bouchées octroient 80 % du plaisir éprouvé. La suite n’est que péché de gourmandise ! Enfin, pour compléter ces bonnes habitudes, pensez à réduire la caféine, à ajouter des aliments complets, à bien dormir, à prendre un comprimé multivitaminé chaque jour et à boire de l’eau minérale. Un bon truc : pour connaître la quantité d’eau dont vous avez besoin : vérifiez que vous n’avez pas les lèvres et la bouche sèche, dans quel cas vous n’êtes pas suffisamment hydraté.

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Quel "sugar-addict" êtes-vous ?

Le Dr Teitelbaum range les "sugar-addicts" en quatre profils de dépendance ◗ Le type 1 concerne les épuisés de façon chronique et les accros aux recharges instantanées de caféine et de sucre.

Le type 2 concerne ceux dont le stress quotidien a épuisé les glandes surrénales.

Le type 3 concerne ceux qui éprouvent de véritables compulsions pour les sucres, provoquées par la prolifération de levures Candida Albicans dans leurs intestins.

Le type 4 concerne les déprimés dont les envies de sucre compulsives sont liées à un problème hormonal (règles, ménopause, andropause).

L’expérience texane

En 2016, une équipe de chercheurs de l’université du Texas “MD Anderson Cancer Center” avait déjà établi un lien entre consommation de sucre et cancer. Leur étude avait porté sur des groupes de souris qu’ils avaient soumises à des régimes plus ou moins riches en saccharose (fructose alimentaire), ce sucre issu de la betterave sucrière ou de la canne à sucre, privilégié par l’industrie et particulièrement présent dans les sodas et jus de fruits industriels. Après six mois, les chercheurs se sont rendu compte que plus de la moitié du groupe nourri avec un régime très sucré – équivalent à ce que consomme la moyenne des Américains – avait développé des tumeurs mammaires, tandis que dans le groupe des souris nourries normalement, moins d’un tiers d’entre elles présentaient de telles tumeurs. Les scientifiques américains ont alors réussi à identifier le mécanisme par lequel le saccharose avait facilité le processus d’inflammation et de croissance de tumeurs mammaires et même la survenue de métastases pulmonaires chez ces souris : une voie moléculaire, la 12-LOX (12-lipoxygénase), serait ainsi en cause. Il leur restait encore à vérifier cette hypothèse chez l’homme.

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