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À la Fashion Week de New York, une designer fait défiler des victimes d’agressions sexuelles

Après avoir défilé, les huit mannequins ont pris le micro à tour de rôle pour raconter leur histoire.

Temps de lecture: 3 min

Pas de mannequin vedette ni de lieu prestigieux pour ce défilé très politique concocté par la Française Myriam Chalek, qui s’est fait connaître en organisant des présentations avec des personnes souvent marginalisées : personnes de petite taille l’an dernier à Dubaï, ou malvoyantes lors de la Semaine de la mode parisienne en 2016.

Pour présenter sa nouvelle collection, la designer française a fait défiler huit jeunes femmes pour témoigner des abus subis, symbole d’une parole retrouvée et de l’impact du mouvement #MeToo aux États-Unis.

Les moyens étaient modestes : salle prêtée par un hôtel bon marché non loin de Times Square, avec du papier blanc déroulé à la va-vite sur la moquette pour guider le passage des « mannequins ».

Depuis le début de la Fashion Week jeudi dernier, certains défilés ont fait référence au #MeToo et #TimesUp, comme Tom Ford avec ses sacs marqués « Pussy Power », la créatrice de 30 ans en avait fait la raison d’être de son défilé.

« En tant que femme, vous avez une responsabilité de contribuer au changement », a-t-elle déclaré à l’AFP. « Si vous dites ‘il est temps que ça change’ ou ‘Time’s Up’, vous vous devez de faire quelque chose » faisant référence à l’organisation créée par plusieurs centaines d’actrices pour financer la défense de victimes d’agressions sexuelles au travail.

Les vêtements n’avaient guère d’importance même si les tenues combinaient systématiquement « matières fortes » comme cuir et fourrure, et « matières délicates », comme soie et tulle, histoire de marquer tant « la féminité » que la « force » des femmes, selon Mme Chalek.

Le but était autre : faire témoigner des femmes. La condition pour le recrutement des mannequins du jour était qu’« elles aient été victimes de comportement sexuel inapproprié ».

Masque de cochon

Après avoir marché sagement au milieu de quelque 200 invités, les huit mannequins ont pris le micro à tour de rôle, debout, chacune à côté d’un homme tout de noir vêtu, le visage sous un masque de cochon en référence à la campagne #balancetonporc.

AFP
AFP

En quelques minutes, elles ont raconté leur histoire, souvent vieille de plusieurs années, lorsqu’un ami de la famille, un petit ami ou un prédateur sur internet les a coincées et leur a fait subir harcèlement, attouchement ou viol, qui sur un campus universitaire, qui dans un jardin public ou chez un parent. Leur voix tremblait parfois.

« Je suis un peu secouée », a déclaré l’une d’elle, après avoir raconté en détail comment elle avait été violée par un flirt et comment elle n’avait pas osé en parler à sa mère pendant des semaines.

« Être ici et parler de ça est tellement important. Je suis vraiment désolée d’avoir à dire ‘Me Too’ mais je suis aussi heureuse qu’on fasse quelque chose, enfin », a-t-elle conclu, sous les applaudissements du public.

Après ces tragiques récits suivis d’un lourd silence, la styliste a estimé que son objectif était atteint.

« D’habitude, je n’aime pas le silence » mais là « il me plaît car j’ai l’impression que vous avez vraiment ressenti » quelque chose, a-t-elle déclaré.

« Je ne dis pas que ce défilé va changer les choses du jour au lendemain mais j’ai l’espoir que vous allez quitter cette pièce et en parler, et que vous serez mieux informés. »

Avant le défilé, elle avait estimé que « si on arrive à faire sortir du silence (…) ne serait-ce qu’une seule femme, ce sera déjà une réussite ».

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