Direction Saint-Pétersbourg, l’ancienne Leningrad, ville-martyre pendant la Seconde Guerre mondiale, assiégée par les nazis pendant 900 jours, ce qui coûta la vie de 800.000 habitants. Inscrite au Patrimoine mondial, conçue par le tsar Pierre le Grand pour impressionner, baptisée la Venise du Nord à cause de la centaine d’îles sur lesquelles elle est bâtie, elle est difficile à appréhender, tant elle est vaste et ses artères larges, sur un schéma éloigné de l’urbanisme d’une ville comme Bruxelles.
La forteresse Pierre-et-Paul était destinée à repousser les assauts des Suédois qui en 1703 avaient des visées expansionnistes au détriment de la Russie. Elle servit surtout à abriter les opposants au régime, tsariste comme communiste, logés dans des cellules sombres et humides. Les dépouilles du dernier tsar y reposent désormais.
L’immense palais de Tsarskoïe Selo, littéralement « le village du tsar », à 25 km de la ville, est l’œuvre majeure de Bartolomeo Rastrelli, l’architecte italien inventeur du baroque russe. Très abîmé par les nazis qui le pillèrent, il a été patiemment restauré comme seuls les Russes savent le faire quand il s’agit de leur patrimoine. Le cabinet d’ambre, par exemple, fut démonté par les Allemands et expédié à l’Ouest, mais le train… n’arriva jamais à destination. Le décor a été patiemment reconstitué à partir de photos. Le jardin à l’anglaise, créé en 1768, au moment où l’engouement pour cette esthétique était à son comble, contraste avec le jardin très ordonné, à la française, conçu 20 ans plus tôt.
L’Ermitage, un joyau unique au monde
L’autre œuvre majeure de Rastrelli, le Palais d’Hiver, est le socle de l’Ermitage, l’un des plus grands musées d’art au monde, bâti autour des 2.500 tableaux et 10.000 pierres précieuses achetés par la Grande Catherine et enrichi par les nationalisations des biens publics et privés après la Révolution d’Octobre. Matisse et Picasso y côtoient l’or scythe. Pendant la guerre, le personnel affamé du musée eut une attitude héroïque et réussit à mettre à l’abri l’essentiel des collections, tandis que l’artillerie nazie visait les bâtiments afin de leur faire prendre l’eau.
Le palais Yussupov, devenu Musée de la vie aristocratique, mérite un détour pour ceux que le personnage de Raspoutine intrigue. C’est là qu’il fut assassiné en décembre 1916, mais son autopsie révéla que le poison et les balles avaient échoué à le tuer. Il mourut en fait d’hypothermie, une fois son corps jeté par les conjurés dans la rivière. Le tsar les exila, permettant ainsi au prince Félix Youssoupov d’échapper aux bolcheviques.
Une balade dans la ville immense ne peut ignorer la superbe perspective offerte par l’église du Sauveur-sur-le-Sang, construite à l’endroit où fut assassiné Alexandre II par un groupe de révolutionnaires en 1881, ou la Nevski Prospekt, l’avenue la plus célèbre de l’ancienne capitale, célébrée par Nicolas Gogol et redevenue un incontournable du shopping. L’immeuble des machines à coudre Singer est un joyau de l’Art nouveau mâtiné d’esthétique new-yorkaise. À l’heure du retour, l’aéroport Pulkovo, conçu par le cabinet britannique Grimshaw, est une spectaculaire oeuvre d’architecture contemporaine, à peine inaugurée et déjà devenue une porte spectaculaire sur la Russie d’aujourd’hui.