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Sexe : la fragilité des hommes

Les problèmes de désir et d’érection ont fort augmenté selon la dernière enquête Ifop d’avril 2019, montrant combien la sexualité masculine est complexe et influencée par de nombreux éléments.

Journaliste Temps de lecture: 6 min

Toujours puissants et performants, tels seraient les hommes ! Toujours désirant et bandant, ainsi seraient les mâles qui dominent depuis des millénaires le monde ! La sexualité masculine a été longtemps présentée comme une mécanique simple et performante. Mais comme le montre la dernière grande enquête Ifop d’avril 2019 (*), elle est bien plus complexe tant elle est influencée par de nombreux facteurs aussi physiques que psychiques. Elle est fragile comme le montrent les fréquents problèmes d’érection ; des dysfonctions qui sont de surcroît en augmentation !

61 % d’hommes touchés par des dysfonctions érectiles

Pas moins de six hommes sur dix (61 %) en ont déjà rencontré au moins une fois au cours de leur vie alors qu’en 2010, ils étaient 49 % et 44 % en 2005. Et pour beaucoup d’hommes, il ne s’agit pas d’un souvenir lointain ou d’une vague expérience de jeunesse dans la mesure où ils sont plus d’un sur trois (38 %) à admettre avoir connu au moins un problème sexuel au cours des 12 derniers mois. Celui-ci peut être un manque de rigidité du sexe durant un rapport (57 %), une absence ou une insuffisance de désir (47 %), une difficulté à conserver l’érection jusqu’à la fin du rapport (46 %) et une absence totale d’érection (29 %). Des pourcentages qui montrent qu’entre le discours longtemps proféré sur la mécanique de la sexualité masculine et la réalité, il y a un monde. Même le désir de l’homme que l’on qualifie de constant si ce n’est envahissant est fragilisé ! Ne dit-on pas que les hommes pensent au sexe toutes les 7 secondes ? Ou toutes les 28 minutes ? Peu importe. L’enquête précise qu’ils sont 47 % à manquer de désir…

Une consommation quotidienne de porno pour 55 % des jeunes

Mais pourquoi cette augmentation des dysfonctions sexuelles masculines ? Sans doute faut-il d’abord la relativiser et la mettre en lien avec la parole masculine qui se libère des obligations de toute puissance. Il suffit de voir le succès du compte instagram « tu bandes » et de ses 116.000 abonnés pour en prendre conscience. Les hommes y confient leurs difficultés à être des mâles. Ils disent leurs complexes intimes et leurs craintes de ne pas bander. Mais la présente étude Ifop réalisée à l’occasion du lancement de Charles.co, une plate-forme de santé dédiée aux hommes, ne pointe pas la libération de la parole comme une cause de l’augmentation des dysfonctions érectiles. Elle l’attribue à des facteurs plus matériels : l’âge, le stress ou le lieu de résidence – on est plus sujet aux problèmes à Paris (46 %) que dans les campagnes (36 %).

Et pour la première fois en France, l’étude montre que la dépendance aux écrans peut avoir un impact négatif sur la libido masculine. Alors qu’en moyenne 38 % des hommes ont des problèmes érectiles réguliers, les moins de 35 ans qui visionnent quotidiennement des vidéos pornographiques sont 55 % à avoir des difficultés. On ne sera pas surpris par ces chiffres car une grande consommation de porno peut perturber la vie sexuelle. Elle risque de conditionner l’excitation à des stimuli qui ne se retrouvent pas dans la vie réelle. Mais l’étude de l’Ifop montre que les jeunes qui sont accros aux réseaux sociaux sont également particulièrement touchés par les dysfonctions érectiles : 39 %. Comme 41 % de ceux qui regardent les applis d’information ou 38 % de ceux qui visionnent tous les jours des films et séries tels qu’en offre Netflix. Déjà on savait que consommer et surconsommer des séries diminuait le nombre de rapports mais voilà que l’occupation augmente également les problèmes sexuels masculins. Pas de surprise non plus, car pour bien vivre une relation sexuelle, tant au niveau physiologique que psychologique, il faut de la disponibilité et du temps. Ce n’est pas après avoir enfilé plusieurs épisodes ou documentaires que l’on peut être en forme pour une partie de jambes en l’air.

Des complexes en pagaille

Pourtant ces soucis sexuels ne sont pas sans conséquence car des complexes peuvent se former. Près de deux tiers des hommes interrogés complexent – et angoissent sans nul doute – quant à leur capacité à avoir une érection (62 %) ou à garder leur sexe dur pendant tout un rapport (65 %) mais ils s’inquiètent aussi de la taille (42 %) ou la forme (27 %) de leur phallus. Cette capacité de nuisance des troubles érectiles sur l’estime de soi sexuelle tient sans doute au fait que la gent masculine a encore une conception du plaisir sexuel masculin très (trop !) axée sur la pénétration : 56 % des hommes – et jusqu’à 64 % des moins de 30 ans – estiment qu’un rapport sexuel doit impliquer une pénétration pour être pleinement satisfaisant. Comme le note François Kraus, directeur du pôle « Genre, sexualités et santé sexuelle » à l’Ifop, « la lutte contre les troubles d’érection nécessite aussi de s’attaquer à certains freins d’ordre culturel au premier rang desquels les injonctions à la virilité qui ancrent dans les esprits une vision très « érectocentrique  » de la sexualité masculine. »

Alcool et drogue comme remèdes

Les hommes complexent et angoissent mais ils ne prennent pas forcément la bonne solution pour résoudre ces problèmes. Parfois même ils optent pour des remèdes dangereux. Les jeunes de moins de 30 ans ont recours à une forte quantité d’alcool (29 %), de la drogue comme de la cocaïne (27 %) ou des produits aphrodisiaques naturels (20 %). Ils sont seulement 25 % à prendre des médicaments comme le Viagra. Tout âge confondu, ils sont plus nombreux à envisager le Viagra : 56 % d’entre eux pourraient en prendre, sachant que cette proportion monte à 68 % chez les hommes ayant récemment eu des problèmes érectiles.

Des craintes par rapport au Viagra

Les risques sanitaires (49 %) et les potentiels effets secondaires (39 %) arrivent largement en tête des freins à l’usage de ce type de traitement mais les facteurs psychologiques ont aussi un impact : un homme sur quatre (24 %) ayant rencontré des troubles érectiles sans prendre un médicament l’explique par la gêne à aborder ces problèmes avec leur médecin.

L’enquête montre encore que peu d’hommes consultent pour ce genre de problème : seulement 28 % ont été voir un spécialiste. Les dysfonctions érectiles restent un grand tabou… « Si les hommes admettent de plus en plus avoir déjà eu des troubles érectiles, cette enquête montre que « la panne sexuelle » reste un profond tabou dans la gent masculine aussi bien dans leur relation de couple que dans leurs rapports avec les professionnels de santé : les hommes étant toujours aussi peu nombreux à passer le seuil d’un cabinet médical pour tenter une prise en charge thérapeutique du problème », commente François Kraus.

(*) Étude Ifop pour charles réalisée par questionnaire auto-administré en ligne du 19 au 24 avril 2019 auprès d’un échantillon de 1957 personnes, de la population française masculine âgée de 18 ans et plus résidant en France métropolitaine. »

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