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Grippe et coronavirus, si semblables... et si différents: «Il reste beaucoup d’inconnues»

Le coronavirus est 1,7 fois plus contagieux que la grippe. Séance de questions-réponses organisée par la rédaction du Soir mag.

Journaliste Temps de lecture: 6 min

C e n’est pas parce que vous êtes malade que vous avez nécessairement le coronavirus. Ce pourrait aussi être cette « bonne » vieille grippe qui ne nous fait (presque) plus peur… Ces deux maladies qui appartiennent à des catégories de virus différentes se ressemblent en effet comme des gouttelettes d’eau. Si l’on connaît le virus de la grippe depuis des décennies, celui du corona actuel laisse encore bon nombre de questions sans réponse.

Sur le plan strictement viral, en quoi le virus de la grippe et celui du Covid-19 se distinguent-ils ?

Ils appartiennent à deux familles de virus très différentes : pour l’un, les virus influenza, et l’autre, les coronavirus. Ils sont différents dans leur structure virale mais pas dans leur mode de transmission. Leur point commun, c’est qu’ils donnent tous les mêmes symptômes grippaux (fièvre, toux, maux de gorge, frissons, courbatures, essoufflement) et peuvent tous déboucher sur des complications.

Les mêmes complications ?

Tous les nouveaux types de coronavirus (Mers, Sras et l’actuel Covid-19) chez la plupart des gens ne donnent rien de spécial mais, on ignore pourquoi, présentent des tableaux plus sévères chez d’autres. Le coronavirus, quoique moins grave que le « Mers » et le « Sras », se transmet cependant plus facilement. Tant les patients atteints de la grippe que du corona risquent, essentiellement s’ils font partie des groupes à risque – personnes âgées et malades chroniques – de développer des infections de type respiratoire (pneumonie virale, voire surinfection bactérienne qui nécessite alors un traitement antibiotique). En revanche, il existe un vaccin pour se prémunir de la grippe… et encore rien contre le coronavirus.

Le coronavirus est 1,7 fois plus contagieux que la grippe. Et le taux de létalité du coronavirus (la proportion de décès par rapport au nombre total des malades) avoisine en moyenne 3 %, là où celui de la grippe n’est que de 0,1 %. Leur mode de transmission est pourtant le même…

Si les virus de la grippe, tout comme les coronavirus, ne se transmettent en principe pas par voie aérienne (ce qu’on appelle parfois l’effet « aérosol »), il n’est pas impossible que, dans certaines circonstances, ils se transmettent également par « aérosol ». Mais généralement, ils se transmettent par voie de contact et via l’émission de grosses gouttelettes (quand vous éternuez, toussez, chantez…) qui tombent par terre à 1 mètre, voire 1,50 m. La contagion est donc limitée dans l’espace. Surtout si l’on compare à la volatilité de virus comme ceux de la tuberculose, de la varicelle ou de la rougeole qui se transmettent, eux, par des gouttelettes très légères – qui se sont desséchées dans l’air – restées en suspension et retombent donc plus loin.

Pour guérir de la grippe, il est généralement préconisé de se mettre au lit, de boire du thé bien chaud et de faire descendre la température. Et pour le coronavirus ?

C’est pareil ! Tant qu’il n’y a pas de surinfection bactérienne, on prend un anti-fièvre et on guérit spontanément. Cela dit, pour soigner certains cas de grippe, on dispose aussi d’un véritable agent anti-viral qui est l’oseltamivir (commercialisé sous le nom de Tamiflu). Mais il n’y a aucune chance que cela marche pour le coronavirus. Si malheureusement ils en viennent à souffrir d’insuffisance respiratoire, les patients seront mis sous respirateur, qu’ils aient contracté la grippe ou le coronavirus. La durée de ces maladies dépend donc d’une personne à l’autre. Environ cinq à sept jours pour la grippe saisonnière et une à deux semaines pour le coronavirus, quoiqu’on ne sache pas encore avec certitude si les personnes ne sont plus contagieuses ensuite. Les patients qui ont bénéficié d’une greffe d’organe font partie de ceux qui gardent le virus le plus longtemps.

Les personnes souffrant de pathologies chroniques sont-elles autant à risque dans les deux maladies ?

Dans les deux cas, ce sont les personnes à partir de la soixantaine, mais aussi celles souffrant d’insuffisance respiratoire, cardiaque ou rénale ou de maladie chronique (diabète, hypertension…) qui ont le plus haut risque de complications. Mais il y a moyen d’éviter la grippe saisonnière via le vaccin. On observe également, comme pour bon nombre de maladies infectieuses, que les hommes sont plus touchés par le coronavirus que les femmes, ce qui ne semble pas être le cas pour la grippe. Le virus de l’influenza tout comme le coronavirus induisent un taux de mortalité important chez les personnes âgées (sauf si elles sont vaccinées), mais davantage encore avec le coronavirus. En fait, les jeunes ont très peu de risques de mourir du coronavirus.

Un médecin qui soigne un patient grippé est-il moins en danger que s’il soigne une personne atteinte du coronavirus ?

Oui parce qu’en principe, tous les médecins – et idéalement tout le personnel soignant – sont vaccinés contre la grippe. C’est la mesure de prévention nº1 du milieu médical. Pour le coronavirus, il faut compter essentiellement sur l’hygiène de la toux et des mains.

Il existe différentes souches de coronavirus, comme pour la grippe. Si on trouve un vaccin, faudra-t-il aussi le réévaluer chaque année ?

On ne le sait pas encore. Toutes les études sur les vaccins lancées actuellement se basent sur un antigène précis, la « spike protein » à la surface du coronavirus, qui est probablement la bonne cible et a déjà servi de base pour étudier le Mers et le Sras. Dans le cas de la grippe saisonnière, la cible de l’influenza mute régulièrement car elle n’est pas stable, d’où la réévaluation annuelle du vaccin. Pour le corona, il faudra suivre l’évolution de la cible avant de pouvoir déterminer sa stabilité. Qui plus est, on sait que la grippe revient chaque année, au sein d’une population globalement immunisée, tandis que le coronavirus est tout neuf et la population non immunisée. En fait, il faudrait plutôt le comparer à un nouveau virus grippal, comme lorsqu’est apparue la grippe de Hong Kong ou la grippe espagnole, avec un taux d’attaque important et des conséquences plus sévères… On ne peut pas être immunisé naturellement contre un virus qui vient d’apparaître.

On entend dire que les enfants meurent de la grippe mais pas du coronavirus, pourquoi ?

Jusqu’à présent, aucun élément épidémiologique n’a montré de mortalité chez l’enfant atteint de coronavirus. Mais pour la grippe, les enfants ne constituent pas le premier groupe à risque non plus. Ils vont surtout contribuer à contaminer les adultes ! En fait, il reste beaucoup d’inconnues par rapport aux coronavirus, tandis que pour la grippe, il y a des centaines de millions de cas chaque année ! En Belgique, on enregistre entre 500.000 et près d’un million de cas de grippe par an, dont entre 1.000 et 2.000 personnes meurent.

Des régions dans le monde sont-elles épargnées par ces virus ?

Non. La grippe saisonnière se déplace dans l’hémisphère Nord en hiver et dans l’hémisphère Sud en été. Certains coronavirus d’origine humaine circulent tout le temps. Pour le Covid-19, qui provient du règne animal – il y a eu un phénomène de franchissement de barrière d’espèce – force est de constater qu’il s’est très bien adapté à l’humain et que la pathologie est donc susceptible d’exister partout dans le monde.

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