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Intimité: le retour du poil

De plus en plus de femmes choisissent de ne plus épiler leur pubis, selon une enquête Ifop/Charles.co

Journaliste Temps de lecture: 5 min

Les poils pubiens ! Tantôt ils dérangent car ils rappellent la nature animale de l’humain, tantôt ils sont appréciés, incarnant la sensualité. Depuis l’aube de l’humanité, ils ne laissent guère indifférents et sont investis différemment en fonction des époques, des cultures, des classes sociales et bien évidemment des sexes.

Ainsi en Occident, souvent au cours de l’histoire, les femmes se devaient d’être lisses et glabres au contraire des hommes ; la pilosité étant même associé à la virilité. Le monde antique qu’il soit égyptien, grec ou romain, aima les corps féminins complètement épilés. Tout comme le Moyen-Âge. Mais les belles aux mœurs légères de cette dernière époque allaient à contre-courant, laissant pousser les poils pubiens pour y accrocher des rubans. Une pratique que des dames respectables de la Renaissance adoptèrent. Ainsi la comtesse Françoise Babou de la Bourdaisière, épouse du Marquis d’Estrées, surprit son entourage quand à sa mort en 1592 – elle fut assassinée, son mari étant protestant –, on découvrit que ses poils pubiens étaient frisottés artificiellement et entortillés de rubans de soie colorés. Le XIX e aima lui cette pilosité naturelle, gage de sensualité – lisez Zola – mais le XXe siècle beaucoup moins à tel point que la pratique de l’épilation se généralisa. La femme séduisante se devait de domestiquer tous ses poils, y compris pubiens. Ces dernières années, les jeunes femmes adoptant même souvent l’épilation intégrale sous l’influence conjuguée de la pornographie, du culte de la jeunesse et de l’obsession de l’hygiène.

No shave !

Notre époque semble revenir de cette haine du poil Une enquête menée en ce début d’année 2021 par l’Ifop pour la plateforme de santé sexuelle Charles.co (1) auprès de 2.000 Françaises et Français montre en effet que le nombre de femmes ne s’épilant pas du tout le pubis a doublé en huit ans ! Pas moins de 28 % de Françaises ont décidé de ne plus toucher à leurs poils pubiens en 2021. Ni ciseaux, ni rasoirs, ni cires ne modifient plus leur intimité ! L’évolution est progressive et continue ces dernières années : la non-épilation étant de 15 % en 2013, 18 % en 2015, 24 % en 2019. La tendance est plus marquée chez les femmes d’un milieu social plus favorisé – 19 % chez les cadres contre 14 % chez les ouvrières — ou affichant une sensibilité féministe (30 %) ou chez les femmes vivant seules (42 %)

Différents facteurs participent de ce changement : le confinement bien évidemment qui nous enferme et prive de tout contact mais surtout le mouvement féministe et l’affranchissement des diktats traditionnels de séduction. Le poil est devenu un des symboles des revendications féministes et de la libération des corps. De nombreux comptes instagram défendent cette pilosité. « Le sens du poil » qui compte plus de 24.000 abonnés, publie des photos de jeunes femmes affichant avec fierté des poils sortant du slip, sur les jambes, dans le creux de leurs aisselles, autour des mamelons. On peut encore citer « Parlons Poils » ou « Paye ton poil » ou « Liberté, Pilosité Sororité ». En France des collectifs affichent sur les murs de la capitale des slogans « Nous ne raserons ni les murs ni nos chattes » pour lutter contre les tabous pesant sur la pilosité féminine.

Des hommes moins enthousiastes

Comment les hommes reçoivent-ils cette évolution et ce retour du poil ? Ils ne semblent pas suivre le mouvement avec le même enthousiasme car 21 % des hommes hétéros apprécient cette pilosité pubienne intégrale et ils sont plus nombreux – 32 % – à aimer l’épilation totale des pubis féminins alors qu’eux-mêmes sont quelque 45 % à ne pas toucher à leurs poils pubiens.

Mais cette pilosité ne leur enlève pas tout désir sexuel puisqu’ils sont 70 % à dire qu’ils pourraient faire l’amour avec une femme dont la pilosité est à l’état brut au niveau pubien (contre 66 % avec une femme non épilée au niveau des aisselles et 61 % au niveau des jambes).

L’épilation reste associée à la séduction féminine. Et le sondage Ifop/Charles.co le confirme. Les femmes le pensent puisqu’elles sont 73 % à estimer que l’absence de pilosité est un critère de séduction féminine. On note que les choses changent puisque l’adhésion à ce stéréotype fait beaucoup moins consensus que dans le passé : – 17 points par rapport à ce que l’on pouvait observer en 2013. Sans doute est-ce là le signe de l’impact des discours et mouvements prônant une plus grande acceptation de la pilosité féminine.

Épilation intégrale en progression

Ainsi si la tendance « poils » fait son retour, la pratique la plus courante reste l’épilation ! Quelque 48 % des femmes interrogées coupent ou rasent partiellement leur pubis en optant pour le style « maillot », « bikini », « ticket de métro » ou « brésilien » quand 24 % adoptent l’épilation complète ! Cette dernière pratique a même augmenté. En huit ans, elle a augmenté de 10 points en moyenne par rapport à 2013. Et en regardant les chiffres de plus près, il apparaît que cette pratique popularisée par les films X n’est plus l’apanage des jeunes de moins de 25 ans (56 %) mais qu’elle s’est aussi diffusée aux femmes de 25-34 ans (48 %, +22 points) et de 35-49 ans (31 %, +20 points).

Faut-il condamner cette dernière pratique ? Chacune décide de ce qu’elle fait de ses poils (pubiens) mais en ayant conscience de tous les enjeux et toutes les conséquences. L’épilation intégrale incarne le désir de séduction et l’acceptation des normes en la matière mais elle entraîne aussi irritations, boutons quand ce ne sont pas des microblessures. Elle est douloureuse, contraignante et coûteuse. Elle prive aussi le corps de la protection que sont les poils. Ceux-ci protègent les parties génitales des frottements et de certaines bactéries ! Et puis l’épilation intégrale frustre de certains plaisirs. Effleurer et caresser des poils pubiens peut engendrer des sensations des plus agréables…

(1)  Méthodologie  : Étude Ifop pour Charles.co réalisée par questionnaire auto-administré en ligne du 18 au 21 décembre 2020 et du 19 au 20 janvier 2021 auprès d’un échantillon de 2 027 personnes, représentatif de la population âgée de 18 ans et plus résidant en France métropolitaine

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