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Regrets sexuels: tout oppose les hommes et les femmes

En ce qui concerne leur vie intime, les deux sexes n’ont pas les mêmes regrets. Comment comprendre ces différences ?

Journaliste Temps de lecture: 6 min

« Non, rien de rien

Non, je ne regrette rien

Ni le bien qu’on m’a fait

Ni le mal

Tout ça m’est bien égal

Non, rien de rien

Non, je ne regrette rien

C’est payé, balayé, oublié

Je me fous du passé »

En décembre 1960, Edith Piaf chantait pour la première fois cet air qui deviendra mythique. Celle que l’on surnomma la « môme Piaf » avait-elle raison de ne rien regretter ? Chacun jugera mais il est vrai qu’il ne sert à rien de ressasser des actes passés, « payés, balayés, oubliés » sur lesquels on n’a plus de prise. Pourtant regretter n’est pas si mal. Avoir des regrets implique de réfléchir sur les comportements posés et cette cogitation, bien menée, doit aider à agir autrement dans le présent et le futur. Regretter pour avoir moins de regrets…

Quoi qu’il en soit, il semble qu’en amour, nous ayons toutes et tous des regrets. Si l’on croit les différents travaux menés sur le sujet – on citera principalement une série de trois études menées par l’Université de Californie à Los Angeles (1) – ces repentirs sexuels sont très genrés. Femmes et hommes ne regrettent pas les mêmes actes intimes et particulièrement en ce qui concerne les aventures d’un soir.

Des regrets féminins liés à des actes et des regrets masculins dus à des non-actions

Les femmes ont tendance à regretter les actes sexuels qu’elles ont posés, à commencer par celui lié à la première fois. Dans la deuxième étude de l’Université de Californie menée auprès de 239 femmes et 156 hommes, toutes et tous hétéros, elles sont 24 % à regretter la perte de leur virginité avec un homme auquel elles n’étaient pas attachées. Les hommes ne sont que 10 % à éprouver ce sentiment. Elles sont 23 % à culpabiliser d’avoir trompé leur partenaire passé ou actuel, contre 18 % pour les hommes. Autres regrets : avoir couché trop vite pour 20 % d’entre elles (10 % pour les hommes.) ou avoir eu une relation avec un homme peu attrayant pour 17 % des participantes (10 % pour ces messieurs) ou un homme qui a feint de s’engager (17 %). Ces regrets sont confirmés par la troisième étude menée par la même université cette fois auprès de 24.200 personnes : pas moins de 43 % des femmes ayant répondu au questionnaire internet ont dit regretter être allées trop vite au lit ou s’être engagées dans trop d’activités sexuelles avec leur partenaire actuel ou passé.

Quant aux hommes, leurs regrets semblent très différents, si ce n’est opposés à ceux des femmes. Si celles-ci regrettent principalement certaines de leurs aventures sexuelles, les hommes eux regrettent leurs inactions. Ils auraient aimé avoir vécu plus de sexe ! Avoir eu plus d’aventures sexuelles occasionnelles, quitter plus vite une femme pour vivre de nouveaux rapports ! Leur premier regret, partagé par 27 % des participants au deuxième volet des études californiennes, c’est le fait de s’être montré trop timide par rapport aux femmes et de ne pas avoir dit leurs désirs (contre 10 % pour les femmes). Viennent ensuite : ne pas avoir été plus audacieux sexuellement pour 23 % (7 % pour les femmes) quand ils étaient jeunes et ne pas avoir davantage profité de leurs années de célibat pour 19 % des hommes (8 % des femmes). On note quand même que 16 % des femmes (contre 8  % pour les hommes) ont des regrets liés à une aventure manquée à cause du « qu’en dira-t-on »…

Des explications évolutionnistes

Comment comprendre de telles différences entre les sexes ?

Andrew Galperin, qui dirigea les 3 études californiennes, avance des explications liées à l’évolution : les deux sexes, le féminin comme le masculin, qui dans cette étude ont le même pourcentage de 58 % d’aventures sexuelles occasionnelles, veulent transmettre leurs gènes mais cette ambition commune a des coûts différents pour les unes et les autres. Les femmes doivent porter les enfants pendant 9 mois puis s’en occuper durant leurs premières années. Avoir une relation sexuelle peut ainsi avoir de lourdes et longues conséquences pour elles si elles se retrouvent enceintes. Leurs vies peuvent être impactées durablement par une aventure d’un soir. Elles sont donc plus susceptibles de regretter des actes sexuels occasionnels. Multiplier les aventures et collectionner les hommes n’augmente pas leurs capacités reproductives et leurs chances de transmettre leurs gènes. Elles préfèrent la qualité à la quantité.

Pour les hommes, la problématique est juste inverse selon les tenants des explications évolutionnistes. Les hommes ne doivent pas se préoccuper des conséquences de leurs actes sexuels puisqu’ils ne prennent pas en charge l’éducation des enfants. Pour transmettre leurs gènes, ils peuvent multiplier les aventures et quand ils en ratent une, ils manquent une occasion de se perpétuer…

Des conditionnements culturels et sociaux selon les sexes

Bien évidemment, ces éléments peuvent jouer. Nous héritons des comportements de nos lointains ancêtres mais comment ne pas voir également dans ces regrets sexuels si différents l’influence de la culture. Aujourd’hui encore, malgré les luttes féministes et la révolution sexuelle, notre société envisage différemment les sexualités féminine et masculine. La sexualité des femmes est moins libre, considérée comme moins forte, plus émotionnelle et plus relationnelle au contraire de celle des hommes qui est vue comme puissante, fonctionnelle, presque mécanique. En ce troisième millénaire, même en Occident, les jeunes femmes qui ont une sexualité libre et non émotionnelle peuvent mal le vivre et pâtir d’une mauvaise réputation. Elles peuvent être stigmatisées par leurs amis, critiquées par leurs familles.

Peut-être aussi regrettent-elles les aventures sexuelles car elles ne leur ont pas apporté beaucoup de satisfactions érotiques. On sait que les femmes ont moins de plaisirs lors des premières fois. Leur orgasme nécessite une maîtrise de leur sexualité et un lâche prise qu’il n’est pas toujours facile de vivre avec une personne que l’on ne connaît pas. Et souvent lors d’une relation sexuelle occasionnelle, la pénétration est privilégiée. Or le coït n’est pas ce qui fait jouir les femmes, seules 20 % connaissent l’orgasme si le rapport se limite à cet acte. Il n’est d’ailleurs pas étonnant de voir que les femmes lesbiennes qui ont participé à l’étude californienne regrettent bien moins leurs aventures sexuelles occasionnelles que les femmes hétéros car ces relations leur apportent davantage de plaisirs sexuels. Elles auraient même tendance à avoir plus de regrets par rapport aux plaisirs manqués ! Comme les hommes.

Et sans doute peut-on lier ces regrets féminins à leur manque d’assurance face à une certaine agressivité masculine. Combien n’ont-elles pas accepté une relation sexuelle parce qu’elles n’ont pas su dire « non » par rapport à un homme insistant…

(1) Sexual Regret : Evidence for Evolved Sex Differences. Étude de Andrew Galperin, Martie G. Haselton, David A. Frederick, Joshua Poore, William von Hippel, David M. Buss, Gian C. Gonzaga. Étude parue en novembre 2012 dans Archives of Sexual Behavior.

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