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L’hymen est-il réellement gage de virginité?

Peut-on constater médicalement qu’une fille est vierge? Nina Brochmann et Ellen Stokken Dahl répondent dans « Les joies d’en bas ».

Temps de lecture: 4 min

Pendant des millénaires, elle fut sacralisée. La virginité fut associée à la pureté, celle du corps et de l’âme. Une jeune fille se devait d’arriver vierge lors de la nuit de noces ; la preuve de sa pureté étant attestée par un saignement sur les draps qui pouvaient être exhibés à la famille et au voisinage ! Aujourd’hui en Occident la virginité a perdu sa dimension mythique : la désacralisation de la société ; la remise en question de la culture patriarcale et les luttes féministes – pour ne citer que ces raisons – sont venues à bout de cette chimère. Mais si en ce troisième millénaire, l’Occident est moins attaché à cette membrane située à l’entrée du vagin, certaines cultures y accordent encore beaucoup d’importance et peuvent mépriser, renier et même tuer une femme qui ne saigne pas la nuit de noces.

Pourtant comme nous l’expliquent Nina Brochmann et Ellen Stokken Dahl dans « Les joies d’en bas. Tout sur le sexe féminin », l’hymen ne constitue en rien un gage de pureté car cette membrane peut ne pas se déchirer et ne pas saigner lors d’un premier rapport sexuel. L’hymen se caractérise en effet par sa souplesse et sa flexibilité. Ces deux caractéristiques lui permettent de pouvoir subsister après une nuit d’amour : « Lors du premier rapport sexuel avec pénétration, l’hymen s’étire avec le reste du vagin. Chez de nombreuses femmes, tout se passe sans encombre mais chez d’autres, l’hymen peut se déchirer et saigner légèrement. Autrement dit, certaines saignent lors de leur premier rapport sexuel et d’autres non. Tout dépend de la flexibilité de l’hymen » écrivent-elles. Une étude basée sur des témoignages atteste que 56 % de femmes saignent lors du premier rapport, quand une autre étude avance le pourcentage de 40 %. De plus ce saignement, expliquent les deux auteures, peut également être dû à des petites éraflures de la paroi vaginale qui saigne si les rapports sont un peu vigoureux et si la jeune femme est tendue et peu lubrifiée. Et les auteures de nous expliquer encore qu’un hymen peut être endommagé quand il est soumis à un fort étirement mais qu’il peut se réparer sans cicatrices visibles ! Ne pas saigner ne signifie en rien que la femme n’est pas vierge !

Nina Brochmann et Ellen Stokken Dahl démontent une autre vérité : il est impossible de conclure à la virginité d’une femme en regardant son entrejambe. « Il n’y a pas de différence visible entre l’hymen d’une fille ayant eu des relations sexuelles et celui d’une vierge », écrivent-elles ! Les deux auteures et médecins norvégiennes expliquent en effet que l’hymen peut avoir des formes très différentes ; être circulaire avec un trou au milieu comme chez la plupart des femmes ou être bosselé, festonné, fragmenté, partiel avec de petites franges le long de la paroi vaginale… L’ouverture centrale peut être petite ou grande comme les bords être larges ou étroits. Les différences sont si importantes d’un hymen à l’autre que leur apparence extérieure ne permet pas de conclure à la virginité ou non de la femme. Ainsi les fameux tests de virginité accomplis par des médecins n’ont aucun sens et encore moins les hyménoplasties, ces interventions chirurgicales qui garantissent un saignement lors de la nuit de noces ou les faux hymens avec sang de théâtre vendus 30 dollars sur internet – des produits dont les politiciens égyptiens ont d’ailleurs souhaité interdire l’importation en 2009.

Mais comme le soulignent les auteurs en clôturant le chapitre consacré à l’hymen, le vrai problème n’est pas seulement le manque d’information sur les liens entre hymen et virginité mais la domination des femmes qu’atteste cet attachement à leur virginité. Pendant des millénaires et encore aujourd’hui dans certaines sociétés, le corps des femmes et leur virginité en particulier a été accaparé par les hommes dominants de sociétés patriarcales.

Dans ces « Joies d’en bas », les deux auteures, ne nous parlent pas seulement de l’hymen. Elles abordent également les règles, la contraception, l’avortement, l’orgasme, le plaisir, le désir, le cancer du col de l’utérus, les fuites urinaires et autres joyeusetés ; etc, etc ! Et toujours elles le font avec la même ouverture d’esprit, la même liberté de ton et la même rigueur – les études scientifiques sont pléthore – Le voyage à travers le sexe féminin, depuis la vulve jusqu’aux ovaires, qu’elles nous offrent, est aussi passionnant qu’instructif car il peut aider à faire la part des choses à propos de bien des mythes qui entourent le sexe féminin. Un ouvrage essentiel !

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Les joies d’en bas est publié chez Actes sud, 448 p., 22,50 euros

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