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Sexe: qui sont les femmes qui perdent le désir?

Souvent le désir sexuel féminin se fragilise dans un couple. Une nouvelle étude brosse le profil de ces partenaires dont la libido diminue.

Journaliste Temps de lecture: 6 min

Je te désire, je te veux, je te fantasme, je te convoite…

Je te veux, toi, ton regard, ta bouche contre la mienne, nos langues entremêlées, nos bras enlacés, nos sexes pénétrés, nos corps réunis ?

Je te désire parce que je veux te connaître, te posséder, nous impliquer, nous rapprocher par les plaisirs échangés.

Le désir sexuel est cette force de vie qui nous fait chavirer et exister. Mais ce désir s’atténue avec le temps de l’amour et davantage chez les femmes que les hommes. De nombreuses femmes perdent l’envie de l’autre quand elles sont en couple. Les pourcentages varient selon les études, allant de 10 % (1) jusqu’à 69 % pour les femmes autour de la quarantaine ! (2) Mais cette perte est souvent associée à de la souffrance dans une société qui considère la sexualité comme le langage premier des couples, leur ciment. Ainsi depuis les années 80, l’Association américaine de Psychiatrie a intégré dans son célèbre DSM, Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, la faiblesse de désir comme un « trouble sexuel ». Nombreuses sont d’ailleurs les femmes qui consultent pour cette raison.

Mais pourquoi les femmes perdent-elles le désir plus que les hommes ?

La question taraude les spécialistes qui selon leurs sensibilités, mettent plus en avant les dimensions biologiques ou relationnelles ou érotiques, domestiques, psys, éducationnelles, culturelles, sociétales… Tous ont raison tant il est vrai que la perte de désir est des plus complexes. Mille et un éléments viennent affaiblir l’envie sexuelle : les problèmes de santé, la fatigue, les abus, les mauvaises expériences, le stress, la prise de médicaments, les enfants, les soucis professionnels ou financiers, les disputes de couple, la non-répartition des tâches ménagères, le manque de sport, l’âge, l’habitude, le non-plaisir, la répétition du même script sexuel, l’éducation familiale, les croyances religieuses, la vision de la sexualité féminine, la méconnaissance de son corps, le manque d’estime de soi, l’absence de communication, la dépression, l’infidélité… On arrête là mais les facteurs sont si nombreux qu’on peut se demander comment il se fait que les partenaires engagés dans une longue relation ont encore du désir l’un pour l’autre.

Des femmes en détresse et des femmes insatisfaites sexuellement

Face à cette complexité, on épingle l’étude qui vient d’être publiée en novembre dernier dans Archives of Sexual Behavior (3) car elle simplifie la problématique sans nier sa complexité. Menée par une équipe de psys canadiens et américain, constitué de Siobhan E Sutherland, Uzma Rehman et Jackson Goodnight, elle classe les femmes ayant peu de désir sexuel – 508 ont été interrogées sur leur quotidien, leur relation amoureuse et leur vie sexuelle – en deux grandes catégories. Pas davantage !

La première est constituée par des femmes qui des problèmes relationnels globaux avec leur partenaire. Elles sont mal dans leur couple, se disent insatisfaites de leur relation conjugale et fort stressées la plupart du temps. Ces soucis se répercutent dans l’intimité. Elles sont mécontentes de leur relation amoureuse – si ce n’est désespérées – et cette détresse relationnelle a des conséquences dans leur vie sexuelle, affaiblissant leurs désirs. Lors des entretiens, lorsque les psys leur demandaient quelles étaient leurs explications quant à la fragilité de leur libido, ces femmes pointaient leur partenaire ou un élément extérieur à elles. On note que ces compagnes peu désirantes et mal dans leur couple que les chercheurs ont qualifié de « globalement en détresse » formaient 8 % des participantes à l’étude.

La deuxième catégorie de femmes ayant peu de désir est constituée de celles qui ne sont pas épanouies sexuellement. Leur relation de couple est plutôt bonne et satisfaisante, tout comme leur niveau de stress est plutôt normal mais elles ne prennent pas leur pied au lit et ne sont pas satisfaites dans leur vie érotique. C’est dans la chambre à coucher que le problème se cantonne. Ces femmes peu désirantes et peu satisfaites que les chercheurs ont qualifiées de « femmes sexuellement insatisfaites » formaient 24 % des participantes ; les 67 % restant étaient des femmes qui avaient un niveau global moyen de désir.

Reste à savoir pourquoi ces femmes ne sont pas satisfaites au lit et les raisons sont plus nombreuses : une éducation reçue trop stricte, des expériences précédentes traumatisantes, une méconnaissance du fonctionnement sexuel, des scénarios sexuels trop répétitifs, l’ennui, un rapport trop centré sur le coït, l’incapacité à atteindre l’orgasme, des douleurs lors des rapports, des complexes physiques, des problèmes de santé, un manque de lâcher prise, un partenaire ayant lui-même des soucis sexuels. Autant de problèmes qui peuvent être dépassés par des consultations sexologiques alors que les femmes de la première catégorie ont plutôt besoin d’un psy ou d’un thérapeute de couple.

La communication si essentielle

Quoi qu’il en soit, ces deux catégories de femmes, celles qui sont globalement mal dans leur couple et celles qui sont peu épanouies sexuellement, ont un point en commun – outre la faiblesse de leur libido : la non-communication sexuelle. Ni les unes ni les autres n’abordent leur vie intime avec leur partenaire. Elles ne parlent pas de sexe ! Il est vrai que la chose n’est pas facile. Beaucoup de femmes ont des difficultés à confier leurs envies érotiques comme l’a montré une autre étude publiée dans Archives of Sexual Behavior en 2019 (4). Elles préfèrent se taire pour ne pas blesser leur partenaire (42 %), parce qu’elles ne se sentent pas à l’aise de préciser les détails des gestes et positions (40 %), sont gênées (38 %) et ne savent pas comment demander ce qu’elles veulent (35 %). D’autres encore (10 %) ont précisé qu’elles ne parlent pas de ce sujet car elles pensent que leur partenaire ne se soucie pas de leur plaisir.

Mais les conséquences de ces silences et absences de communication sont simples : pas ou peu d’orgasme et même des jouissances feintes et la perte de désir… On ne le dira jamais assez, il faut parler, échanger, communiquer, dire ce qu’on aime ou n’aime, voudrait ou ne voudrait pour que la sexualité soit positive.

(1) Prevalence of Low Sexual Desire among Women in Britain : Associated Factors. recherche de Mitchell K., Mercer C., Wellings K., Johnson A.J.. Publié dans Journal of Sexual Medicine en juin 2009 (2) Prevalence and Predictors of Low Sexual Desire, Sexually Related Personal Distress, and Hypoactive Sexual Desire Dysfunction in a Community-Based Sample of Midlife Women. Etude de Worsley R., Bell R., Gartoulla P ;, Davis S. Publiée dans Journal of Sexual Méd. en 2017 (3) A Typology of Women with Low Sexual Desire. Etude de Siobhan E. Sutherland, Uzma S. Rehman & Jackson A. Goodnight. Publiée dans Archives of Sexual Behavior en novembre 2020. (4) Women’s Sexual Satisfaction, Communication, and Reasons for (No Longer) FakingOrgasm : Findings from a U.S. Probability Sample. Etude de Herbenick D, Eastman-Mueller H, Fu TC, Dodge B, Ponander K, Sanders SA. Publiée dans Arch Sex Behavior en novembre 2019.

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