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Les sexes de Dieu

Dieu n’a pas un sexe mais deux, si l’on croit le philosophe belge Ludovic Robberechts.

Journaliste Temps de lecture: 5 min

Dieu aurait-il un sexe ? La question semblera blasphématoire à d’aucuns mais tous, croyants ou non, nous nous représentons le créateur d’Adam sous la forme d’un homme âgé et assuré. Un de ses plus beaux portraits est sans doute celui que Michel Ange fit de lui dans La Création d’Adam qui orne le plafond de la Chapelle Sixtine à Rome. Yéovah y est cet homme musculeux, viril, doté d’une longue barbe blanche et soutenu par une belle jeune femme. Mais que cachent les légers vêtements du créateur ?

Dieu a-t-il un sexe ?

« Il en a même deux ! La tradition biblique dont je me réfère renseigne dès ses premières pages que Dieu créa Adam à son image et précise, « mâle et femelle, il les créa ». Trois fois, le texte de la Genèse souligne l’importance de cette image-là. Cette représentation est autorisée et même recommandée alors que toutes les images sont interdites dans la Bible. Toutes sauf celle-là ! Vous pouvez dès lors concevoir Dieu comme ayant une image à la fois d’homme et de femme et concevoir que cet homme et cette femme se regardent comme de statues ou sont en pleine activité amoureuse. C’est pour cette raison d’ailleurs que j’ai intitulé le cours que je donne cette année à l’UDA, l’Université des Aînés de l’UCL Woluwe « Un Dieu porté à l’érotisme ».

Dieu a donc un sexe de femme !

« Absolument ! Il a un sexe d’homme et un sexe de femme. Si l’Évangile de St Jean insiste surtout sur le côté masculin de Dieu qui est présenté comme un père, le texte du Premier Testament – autrefois appelé Ancien Testament – note à plusieurs endroits que Dieu a un sexe féminin. Il précise encore que Dieu est « matriçant », qu’il a une « matrice », qu’il est un père qui porte ses enfants dans sa matrice, qu’il est ému jusque dans ses entrailles par ses enfants. En français, ce côté maternel a été traduit par le terme « miséricordieux ».

Mais n’est-ce pas une façon de dire que tous, que nous soyons hommes ou femmes, nous avons un côté masculin et un côté féminin ?

« Pas seulement car le texte contient des allusions au sexuel et précise que Dieu est à la fois mâle et femelle. Mais je ne sais pas comment il se débrouille avec ces deux sexes mais le texte biblique souligne cette dimension sexuelle de l’image. »

Pourquoi dès lors la sexualité est-elle devenue si taboue pour la religion chrétienne ?

« Je ne dirais pas cela. La sexualité étant l’image même de Dieu, elle est grande, très grande, très respectable. On ne peut pas dès lors la banaliser. La sexualité est une expérience divine, une façon d’expérimenter Dieu. Dans la grandeur de la sexualité, on vit celle de Dieu. »

Mais pourquoi dès lors priver les religieux de cette expérience unique et les condamner au célibat ?

« La sexualité est une expérience divine – la meilleure peut-être – mais elle n’est pas la seule. Et puis le célibat n’est-il pas une manière de valoriser la sexualité ? Par sa privation, il est en tension avec le sexuel. Quant au célibat du moine, il est complexe car le moine épouse le créateur, vit en union avec lui. Tout comme le curé est marié à sa communauté même si sa vie est douloureuse tant elle est marquée par la solitude. Quant aux religieuses, elles ont été appelées longtemps les épouses du seigneur… Mais pour le judaïsme, le célibat est une prétention excessive, un orgueil. Par ailleurs dans le Premier testament, le célibat est clairement condamné. »

Jésus n’était-il pas célibataire ?

« Je pense au contraire qu’il était marié et que ce mariage était d’une telle évidence pour l’époque qu’il ne fut pas renseigné dans les textes. Tout comme il est clair que Jésus Christ n’était pas indifférent aux femmes, comme on le voit dans plusieurs passages des évangiles. »

Pourquoi si Dieu est homme et femme, pourquoi si Jésus aimait les femmes, l’Église a – t-elle une vision si méprisante des femmes. Elle n’accorde pas l’égalité entre les hommes et les femmes mais l’équité, leur refuse la prêtrise…

« Je crois que l’on peut expliquer cela non par le contenu des textes religieux mais par le complexe des hommes par rapport aux femmes. Les hommes se sentent inutiles par rapport aux femmes, subalternes car ils ne sont que les produits et mêmes les sous-produits des femmes et ils se sont révoltés contre cela en voulant les dominer. Mais le contenu des textes religieux du Premier Testament est selon moi crypto féministe : leur dimension féministe est cachée sous un style machiste. Mais quand on lit attentivement le Premier testament, on découvre cette importance de la femme. »

Mais Ève est bien présentée dans la Bible comme la tentatrice, celle dont la faute a valu à son couple d’être chassé du paradis, d’enfanter dans la douleur et de devoir travailler…

« Dieu a dit à Adam qu’il ne pouvait pas manger les fruits de l’arbre de la connaissance. Ève explique pourtant au serpent que Dieu a interdit de ne pas manger et de ne pas toucher. Elle ajoute un interdit. Cela laisse supposer qu’Adam l’a mal informée de l’interdit de Dieu. La faute reviendrait ainsi à Adam et non à Ève… »

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