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Harcelée après avoir critiqué l’islam, Mila a visité la Grande mosquée de Paris, en signe d’«apaisement»

L’accès à la salle de prière est habituellement « strictement interdit » aux visiteurs. Mais la jeune Mila, à qui les sorties polémiques sur l’islam ont valu un torrent de haine et de menaces sur internet, a pu visiter jeudi toute la Grande mosquée de Paris, un signe d’« apaisement ».

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Chaussettes roses et grises, cheveux teints en vert attachés par un élastique, tête rasée sur les côtés, Mila avance sur les tapis de prière, sous l’œil intrigué de quelques croyants. Pendant deux heures, le recteur de la « GMP » Chems-eddine Hafiz lui offre une visite VIP de ce lieu inauguré en 1926 ainsi qu’une initiation à l’islam, avec un Coran rose en cadeau.

Au milieu de la végétation luxuriante des jardins de la Grande mosquée, le clapotis des fontaines étouffe le bruit de la ville mais pas le mot « paix », répété à plusieurs reprises par l’hôte et son invitée. Début 2020, sur Instagram, Mila avait riposté rageusement à un homme qui l’insultait « au nom d’Allah  » : « l’islam, c’est de la merde (…) Votre religion, c’est de la merde, votre Dieu, je lui mets un doigt dans le trou du cul, merci, au revoir  ». Depuis, elle est menacée de mort, cyberharcelée, déscolarisée et vit sous protection policière.

Mercredi, le tribunal correctionnel de Paris a condamné onze de ses cyberharceleurs à quatre à six mois de prison avec sursis. Au lendemain de ce jugement, elle fait le vœu que sa présence dans ce lieu de culte soit « apaisant(e) pour tout le monde  ». « Et j’ai beaucoup appris en venant ici  », ajoute-t-elle. Si l’imam de la mosquée l’accueille sobrement, Chems-eddine Hafiz multiplie lui égards et gestes d’affection. « Allez viens, Mila  » : pendant deux heures, le recteur lui fait découvrir le minaret, la mosquée et les jardins. « La mosquée de Paris est un lieu ouvert à tout le monde. On veut lui montrer réellement, en tant que musulman, ce qu’est l’islam  ».

« Leçon positive »

Malgré son climat « amical », la visite est source d’inquiétudes en termes de sécurité. «  Moi, je prends le risque. Vous pleurerez pour moi  », ironise le recteur. « On dialogue, on fraternise, on débat, on n’est pas obligés d’être d’accord », se félicite l’avocat de Mila, Me Richard Malka, vieil ami et confrère de barreau de M. Hafiz. Il espère qu’une « leçon » positive sera tirée de l’après-midi par « ceux qui se sont laissés aller à la haine  ».

Chems-eddine Hafiz n’a pas oublié les propos de Mila et rappelle que l’« islam est une religion que, bien évidemment, il y a lieu de respecter  ». Mila, dédouane-t-il toutefois, « a eu des mots durs dans un contexte particulier  », celui d’un harcèlement en ligne. Il hésite. « Je ne crois pas que ce qu’elle a dit… peut-être que ça a trahi sa vraie pensée, mais moi je suis persuadé qu’il faut sortir des clichés  ». « Il y a eu à un moment un incident malheureux, mais le fait qu’elle vienne ici est source d’espoir  ».

Et Mila, a-t-elle changé de regard sur l’islam ? Elle hésite puis élude : « Je serais mitigée sur la question. Ça dépend. Entre les choses qui sont mal interprétées, entre ce qui est vraiment ma pensée…  » A l’entrée de l’immense patio jouxtant la salle de prière, une femme voilée, originaire de Seine-Saint-Denis, s’approche de la visiteuse. « Je suis fort agréablement surprise de vous voir ici. Votre démarche me touche énormément, je suis très émue  », dit-elle à Mila.

Mais la prudence reste de mise. « Je ne veux pas être filmée  », indique aux journalistes l’interlocutrice de Mila, inquiète pour sa sécurité. Avant de partir, la jeune femme confie son « plaisir » quant à cette « visite amicale  ». Une « marque de paix, c’est très important pour moi  ». Elle reste toutefois sous la surveillance des réseaux sociaux, qui scrutent ses moindres faits, gestes et déclarations. À peine entrée dans la Grande mosquée, une femme signalait d’ailleurs sa présence sur Twitter : « Y’a Mila. Quelqu’un pour m’expliquer ? »

La rédaction avec AFP

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