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Vous simulez l’orgasme? Vous n’êtes pas féministe!

Bien des femmes simulent la jouissance mais une nouvelle étude révèle les relations entre le plaisir suprême et la conception des rapports hommes-femmes…

Journaliste Temps de lecture: 5 min

Cris et soupirs, halètements rapprochés et corps qui se tend : il n’est guère difficile pour une femme de simuler la jouissance suprême. Et nombre d’entre elles reconnaissent d’ailleurs avoir simulé l’orgasme pour de multiples raisons défendables pour les unes et critiquables pour les autres : flatter les ardeurs de leur partenaire, faire monter l’excitation et la jouissance, s’ouvrir au plaisir de l’autre, abréger un rapport sexuel décevant ou peu désiré, faire croire qu’on prend son pied, cacher son incapacité à atteindre le 7 e ciel…

77 % de femmes simulent

Une toute dernière étude (1) publiée dans les « Archives of Sexual Behavior » précise même le pourcentage des femmes qui ont déjà pratiqué ce « faked orgasm » : pas moins de 77 % ! Le pourcentage impressionne mais là n’est pas le plus intéressant de cette nouvelle étude menée par Emily A. Harris. La chercheuse en psychologie de l’Université de Queen’s au Canada a voulu en effet connaître les liens entre la simulation et les conceptions idéologiques des femmes, persuadée comme elle l’expliqua à PsyPost que « nos idéologies – notre vision du monde, y compris celle des hommes et des femmes – nous aident à guider ce que nous faisons dans la chambre à coucher. »

Avec ses collègues Matthew J. Hornsey, Hannah F. Larsen et Fiona Kate Barlow, la jeune psychologue ainsi interrogé 462 femmes hétérosexuelles du Royaume-Uni vivant en couple depuis au moins quatre mois et ayant en moyenne 38 ans. Elle les a questionnées sur leurs pensées politiques, leurs conceptions religieuses, jugements des rôles masculins et féminins, visions du sexe et de l’orgasme. Elle leur a demandé d’évoquer l’histoire de leurs relations, la capacité à atteindre l’orgasme, les aptitudes sexuelles des partenaires et la fidélité.

Les femmes non féministes simulent le plus

Ainsi Emily Harris a constaté que les femmes qui simulaient le plus fréquemment l’orgasme étaient celles qui avaient des conceptions non féministes et affichaient ce qu’elle a décrit comme « un sexisme hostile », soit la conviction que les femmes qui défient le pouvoir des hommes sont des manipulatrices subversives car les femmes existent selon elles, pour servir les hommes qui sont supérieurs à elles… « Les croyances des femmes en matière de genre sont associées à leur probabilité de simuler l’orgasme. Plus précisément, les femmes qui pensent que les hommes ont besoin d’un orgasme pour se sentir satisfaits, vont ressentir une plus grande pression pour l’orgasme et seront plus susceptibles de simuler la jouissance », a déclaré Emily Harris à PsyPost. Et d’expliquer encore que ces « femmes qui ont une attitude anti-féministe n’ont rien qui puisse les empêcher de simuler l’orgasme, alors que les femmes qui adoptent une vision du monde féministe ne peuvent pas simuler l’orgasme, car cela va à l’encontre de leur croyance dans le droit d’une femme au plaisir et à son droit de parler. »

Compétences sexuelles et plaisirs

De même celles qui simulaient le moins l’orgasme étaient très logiquement celles qui l’atteignaient facilement et attachaient une grande importance aux aptitudes sexuelles de leur partenaire. Quoi de plus logique, plus vous avez de compétences sexuelles, moins vous avez besoin de faire croire que vous avez du plaisir. Compétences, on le rappelle, qui s’apprennent et s’acquièrent !

Cette recherche montre combien la sexualité est bien plus qu’un comportement physique et qu’elle est sous l’influence d’éléments aussi bien personnels que relationnels et idéologiques. Et ces derniers sont souvent oubliés, négligés comme si nos comportements les plus intimes échappaient eux à l’influence de nos visions du monde. Emily Harris et ses collègues nous montrent combien des conceptions anti féministes héritées de siècles de domination patriarcale empêchent les femmes d’accéder à la jouissance.

Déceptions sexuelles pour les femmes anti-féministes et les hommes machos

Et comment ne pas mettre cette étude en parallèle avec celle (2) mettant en évidence l’insatisfaction sexuelle des hommes ayant des conceptions machistes. En février 2018 des chercheurs de l’Université de Tel Aviv et de la Lawrence University du Wisconsin ont montré que les hommes ayant des conceptions machistes des rapports hommes et femmes étaient insatisfaits de leurs relations amoureuses, car ils se sentaient menacés dans leur virilité et anxieux.(voir article publié sur le site du soirmag/sexo : les-machos-sont-ils-heureux-au-lit)

Ainsi les visions inégalitaires des hommes et des femmes ont des conséquences négatives jusque dans l’intimité de la chambre à coucher ! Ils nuisent à l’épanouissement sexuel des femmes et des hommes. Tout comme pour ces dernières, simuler l’orgasme ne fait que consolider le fossé orgasmique qui sépare les hommes et les femmes. Nombre d’études attestent combien les hommes jouissent bien plus souvent que les femmes. La dernière en date, de 2017, précise que 95 % des hommes hétéros ont « souvent ou toujours » un orgasme, contre 65 % des femmes hétéros…

(1) «Croyances concernant le genre prédisent la fausse orgasme chez les femmes hétérosexuelles », étude de Emily A. Harris, Matthew J. Hornsey, Hannah F. Larsen et Fiona Kate Barlow, publiée en juillet 2019 dans Archives of Sexual Behavior. (2). « La dichotomie Madonne-Putain : les hommes qui perçoivent le fait de prendre soin des autres et la sexualité comme s’excluant mutuellement, approuvent le patriarcat et montrent moins de satisfaction relationnelle », étude de Orly Bareket, Nurit Shnabel, Rotem Kahalon, de l’Université de Tel Aviv et Peter Glick de Lawrence University publiée dans Sex Roles en février 2018

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